La lettre dans la malle

La malle se trouvait au grenier. Je voulais retrouver la dernière lettre que Vania m’avait écrite en ce mois d’août si chaud et si poisseux. Après, je n’avais plus eu de nouvelles d’elle. J’avais cherché partout. Mis des petites annonces, remué la poussière, le ciel et la terre, en vain. En substance, Vania savait. Elle me faisait ses adieux, m’enjoignant de continuer d’être heureuse, de peindre, de faire des enfants. J’avais 20 ans. Tout juste si je ne me faisais pas encore des couettes le matin.

C’est l’hiver qui a suivi que j’ai rencontré Georges. Je ne lui ai pas parlé de Vania tout de suite. Je voulais profiter de la poésie de notre rencontre. Il neigeait beaucoup et Vienne était toute blanche. Il y avait juste la barre en fer que je fixais le soir à la porte qui me rappelait le danger qui nous menaçait. On allait au musée. Là, il faisait chaud. On regardait les tableaux de Klimt et leur douceur, leur éclat nous embarquait.

Je travaillais au département de restauration du patrimoine pour gagner quelques sous. Georges, lui, était médecin. Je peignais la nuit, beaucoup le visage de Vania. Georges faisait peu de commentaires sur les cernes noires qui entouraient mes yeux.

Au printemps, j’ai senti que quelque chose était en train de naître entre lui et moi. Une forme d’engagement. A l’intérieur de moi, je me sentais renaître. J’ai moins peint le visage de Vania. J’ai commencé à lui écrire. Je lui ai raconté la douceur des jours, les baisers de Georges. J’avais des coups de barre assez violents à cause de toute cette fatigue, mais je sentais que j’allais continuer. Continuer à vivre. Coûte que coûte. Avec ou sans Vania. Avec le mystère. L’incompréhension. Et c’est ce qui s’est passé. J’ai continué.

Aujourd’hui, j’ai besoin de retrouver cette lettre. Pour la mettre en regard avec ce qui s’est réellement passé.

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