Courir

Le ciel ensoleillé sur les capucines faisait bouillir l’horizon. Mû par un sentiment d’urgence, il courait de toutes ses jambes, pour fuir, pour sauver sa peau. Ses pieds étaient cloqués, ses genoux grinçaient, son dos le pinçait, sa nuque était raide, et son souffle court. Court, comme lui qui court, par saccades, la tête serrée, la poitrine oppressée.

Permettez-moi de vous situer le contexte. Sinon vous n’y comprendrez rien. Il faut être un peu précis, pour votre bien, cher lecteur. J’ai en effet oublié de vous dire que cette histoire a lieu dans les alentours d’une ville moyenne. Ni trop grande, ni trop petite, vous l’aurez deviné. Et qu’elle a lieu de nos jours. Evidemment, puisqu’il s’agit de vengeance, de dettes, de violence. Et de romance, enfin quelque peu.

Je reprends donc la course d’Archibald. Sa salive avait le goût métallique du sang, mais si ses jambes ne l’acaient pas laché, il ne se serait pas arrêté pour boire. Il se demanda alors comment il allait se débrouiller pour rembourser Tony. Il pensait bien au fond de lui qu’il n’avait que très peu dexchances de réunir l’argent nécessaire, et encore moins de ne pas être tué, même s’il y parvenait. Préférait-il être tué que torturé d’ailleurs ? Aussi étonnant que cela puisse paraître, il se sentait suffisamment fort et chanceux pour obtenur la mort, plutôt que la souffrance.

Vous pourriez lui objecter qu’il pouvait tout aussi bien avoir les deux ; ou me faire remarquer que ce genre de pensées n’a rien d’extravagant dans ce genre de situation. Mais le narrateur que je suis répondrait au lecteur que lui n’en sait rien ! J’ai en effet été plutôt bien élevé, dans la peur de connaître la douleur, sans que cela soit néanmoins trop marqué pour ressentir l’envie de la voir chez autrui. On a coutume de dire qu’on ne sait pas comment l’on réagirait  en situation extrême. C’est probablement vrai, mais certainement que moi aussi, je courrais.

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3 réponses à Courir

  1. Agrippa Delil dit :

    Je verrais bien pour ton texte le titre de Woody Allen :
    TAKE THE MONEY AND RUN

  2. Agrippa Delil dit :

    Clint aussi. Surtout dans ET POUR QUELQUES DOLLARS DE PLUS

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