En apesanteur

Il tourne, rien qu’avec les épaules. D’une petite poussée vers la gauche, d’un battement de doigts de pieds.

« Chers amis, me voyez-vous sur vos petits écrans ? »

Il attend une réponse, les pieds collés au plafond. A moins que ce ne soit le sol ou le mur ?

Zut, il a perdu ses repères. C’est que tout s’est mis à bouger, dans la cabine. Ils ont dû oublier de coller les meubles.

« Ça va pas être facile de faire mon discours, avec tous ces objets qui flottent autour de moi ».

A cet instant même, l’armoire métallique heurte sa jambe gauche.

« Ça alors, elle rebondit ! J’ai rien senti. On dirait qu’elle pèse trois grammes ».

Il essaie de la rattraper, mais à chaque fois qu’il la touche, elle rebondit contre le bout de ses doigts et lui échappe.

« Bah, si tout rebondit, comment je vais faire pour manger ? »

Il se dirige vers son sac où il avait mis une pomme avant le départ, avec quelques bouteilles de vin. En ouvrant le sac, des dizaines de morceaux de verre s’en échappent. Pointus, coupants. Il commence à paniquer.

« Zut, je suis à l’antenne : il me faut sourire ».

En réalité, il n’est pas à l’antenne. Pas plus qu’en apesanteur dans une fusée. Il est en train d’écrire un texte dans un atelier d’écriture, où il a tiré trois mots sur des bouts de papier : en apesanteur, sourire, discours.

Il lui fallait 12 minutes à crayonner. Il l’a fait.

Le visage sérieux. Sans rien dire.

Les fesses posées sur une chaise en bois.

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