C’est jeudi, le jour de Jupiter.
Le jour pour jouer.
Le jour pour jouir de la vie.
Le jour de la gourmandise !
Le jour où je suis là-où-tu-es-là.
Où tous les deux, on s’enlace.
Le jour saint qui n’est pas dimanche.
Le jour où je dis oui.
Où tu dis oui.
Dis-moi, tu dis oui, hein ?
Dis-moi, même si je n’ose pas te demander.
Dis-moi, même si je reste là, les yeux baissés.
Dis-moi oui, pour que je dise oui.
Donne-moi le La.
Donne-moi le droit de venir jusqu’à toi.
Ne me tourne pas le dos.
Soit mon amie
Ne me laisse pas sur le sol.
Tout fat, tout bas, tout las.
Si tu savais tout ce qu’il y a dans ma tête !
Si tu voyais comme je bondis !
Comme mes yeux sont larges et mes mains ouvertes.
Ne me dis pas que je n’existe pas.
Que je n’ai pas d’avis, pas d’idée.
Que je suis terne et caché.
Silencieux, immobile.
Que je reste collé comme les statues
Que je ne suis bon qu’à être l’ami du jeudi
Celui qu’on peut secouer jusqu’au samedi
Et puis qu’on abandonne, pour aller faire la fête,
pour exister crescendo.
Je ne veux pas t’éviter,
mais dès que j’avance vers toi,
tu regardes ailleurs.
Alors ma voix est toute petite.
De sortir un mot, me fait pleurer.
Alors je rentre au-dedans,
je me recroqueville.
Je suis tout sec.
Je reste là et toi y’a déjà longtemps que tu n’es plus là.
Alors je pense à autre chose,
je regarde la télé
avec mes yeux.
Avec les yeux de ceux qui sont là.
Je pleure quand le personnage est triste.
Je suis ses yeux.
Ils me rentrent dans le ventre.
Ils me tordent les boyaux,
dévalent dans mes entrailles,
entendent ce que je n’ai jamais osé dire.
Pour cinq piécettes, je voudrais qu’ils se taisent.
Mais c’est trop tard, ça monte dans ma gorge.
C’est plein d’eau. Ça rigole. Ça torrent.
Ça dévaste, ça inonde.
Ça jette à terre, ça finit à genoux
Ça redevient tout petit, tout riquiqui,
tout timide.
Comme un doigt contre la vitre
comme un dessin sur la pierre.
Comme un cri dans ma bouche
qui ne vient pas,
à cause de l’espace trop rempli,
de l’air trop solide.
Heureusement, tout ça, c’est fini.
C’est jeudi, tu es là.
En apesanteur.
Tu souris, tu t’en fous
de mon discours
tu ne penses qu’à me dévorer
grande gourmandise
joyeuse simplicité
de nos traits d’union
Ton texte est encore plus puissant que dans mes souvenirs Philippe ! Je n’avais pas entendu que ce dernier vers résumait tout le texte.
Merci de l’avoir partagé pour que je puisse le lire, le relire et le re…