Par les yeux de ta mère

Le soleil brûle nos peaux, mais sèche nos tissus et fixe les pigments de nos teintures. Les vois-tu ma fille, les pauvres mains de ton père ? Osseuses et harassées par des années de famine, de guerres et de labeur. On dirait des osselets, si bien que j’ai peur à chaque mouvement brusque d’entendre mes phalanges s’éparpiller au sol.

J’en voudrais presque au vent qui me retînt envers et malgré tout en ce jour béni de Dieu. Je m’en allais combattre, défendre notre terre, la teinturerie de mon père qui te reviendra bientôt et les montagnes de pierres ou chaque arbre s’élève comme un miracle. Mais le vent a soufflé, comme sur une plaine, s’engouffrant dans l’enclave abritant le village pour faire vivre les étoles et s’envoler un voile que ta mère attrapa. J’ai été lâche d’amour, à la honte de tes oncles, à la fierté de grand-mère. Parce que ta sainte mère ne voulait pas que je meure et par toutes les promesses qui émanaient de son regard.

Tu ne me croirais pas, si je te disais qu’à ce moment précis, dans ce premier regard, ce sont tes yeux j’ai vu, et ton rire, ta quiétude que seule elle provoquait, même sous le cri des bombes.

 

Jeune écriveur de pensées, transmutateur de rêves, jongleur funambulaire de mots (mais plus souvent mordeur de poussière avouons le...). Tout nouveau sous les toits, j'aimerai m'y nicher quelques temps.

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