Barbe à Papa

Sophie, rouge d’excitation, hurlait à travers les chambres des enfants : « moi, j’aime la barbe à papa, oui, oui. Dis Bon papa, tu pourras nous en acheter ? dis, tu le promets ? »

Ce goût prononcé pour cette sucrerie enturbannée & colorée lui venait d’une sortie à la fête foraine avec ses cousins.

Ce jour-là, elle découvrait pour la première fois, du haut de ses cinq ans, qu’elle était une princesse pour les quatre garçons de mon frère. Ils montraient leur joie & leur fierté de sortir avec une fille. Fine mouche, elle l’avait vite compris ; mais même si elle cherchait à ce que cela ne se voit pas, tout en elle le disait à l’entour. Elle allait de l’un à l’autre, proposant sans cesse une nouvelle activité, un jeu, une blague ou une bêtise. Les garçons en étaient tout intimidés, eux si gaillards & turbulents d’ordinaire. Leur mère avait dû, avant le départ, les sermonner & leur demander de « montrer l’exemple ».

Tout à coup, au détour d’un manège, le marchand était apparu, surmonté de ses nuages multicolores : les barbes à papa. Elle n’en avait jamais vu. « Eh les gars !! regardez ce que je vois. C’est quoi ça ? » « Oh c’est rien, dit l’ainé. C’est des barbes de messieurs qui ont été peintes. C’est juste pour rire. » Mais Sophie voyait bien que des parents en donnaient à leurs enfants & que ceux-ci plantaient leurs dents dans les files blancs, roses, bleus, ou verts & qu’ils s’en collaient tout autour de leur bouche. « J’en veux, j’en veux, s’il vous plait. »

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