Calixte

« Tu vois, Calixte, la nuit tous les moutons sont gris », je ne dis pas « loup » pour ne pas effrayer mon petit dont je sens la main ronde, potelée avec de petites fossettes dans la mienne caleuse. Je sais profondément qu’elle est confiante.

Il avait voulu, ce soir-là, faire comme le Chaperon-Rouge, aller par les sentiers de notre grande forêt retrouver Bonne-Maman. Il n’arrêtait pas de parler, faisant les questions et les réponses avec la même détermination que nos pas dans les feuilles. Ne pas laisser le chant de la hulotte envahir son esprit qui s’ouvrirait alors à l’angoisse de toute cette vie qui l’entourait, se l’appropriant façon « je t’aime, moi non plus ».

« Bon-Papa, tu sais, je l’ai vue sortir du dessous du hangar, quand nous avons quitté la cours. » « qui donc, mon bonhomme ? » « la chouette. Elle est là, je l’entends. Tu crois qu’elle va nous attaquer ? » « Oh non ! pas des grosses bêtes comme nous. » « Elle mange quoi ? » des mulots ou des musaraignes ; mais ce qu’elle préfère, surtout pour nourrir ses petits, ce sont les grenouilles. » « Ah bon ! »

Le silence qui suivit était de courte durée. Une branche semblait avoir gémi en haut d’un hêtre pourpre. « Il y a une grosse bête là-haut qui secoue la branche pour nous faire peur ; mais on a pas peur, hein, Bon-Papa ? t’as peur ? parce que moi, j’ai presque pas peur. Maxence, elle dit que dans le noir, on a toujours peur. »

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