la Vauxhall rouge

Kevin & Marilyne avait accepté ce pari que leur avait quasi imposé leurs huit petits-enfants : sortir de la bicoque qui leur servait d’habitation tous leurs vêtements & les faire entrer dans le coffre de la Vauxhall rouge framboise gagnée à la tombola du pasteur Querry.
Tout était là, devant eux, dans une débauche de couleurs, de matières, de formes, sur le trottoir le long de la voiture.
Le challenge allait commencer. Il n’y avait aucun absent des habitants de la cité. Tous avaient tenu à être présents.
Les deux s’étaient assis un instant pour la photo. Le coffre grand ouvert, ils se demandaient encore, en se chamaillant, s’il fallait commencer par les souliers, bottes de cavalier, ou escarpins ; plutôt que par l’épaisse veste de fourrure pour la chasse aux loups.
Marilyne, à la voix sur-aigüe, prétendait, comme d’habitude, tout régenter ; tandis que Kevin essayait de bâtir un plan d’action. Il ne fallait pas non plus y passer l’hiver, & tout devait être terminé à la nuit. Il restait trois heures.
Le hasard à voulu tout à coup que Pomponette, leur chatte angora, disparue depuis trois semaines, réapparue. Je restais baba devant cette fugitive retrouvée.
Le temps passait, le coffre paraissait plein ; mais le trottoir devant chez eux était toujours couvert de ce tapis multicolore.
Pomponette était à la fête car dans cet amas de tissus des souris grises avaient niché & les petits étaient encore là, chauds & roses.
Dans cette ambiance de kermesse fiévreuse, Marilyne & Kevin étaient les seuls vrais acteurs. Les autres regardaient, dubitatifs, moqueurs, & on pouvait entendre en sourdine des conseilleurs ou même certains qui prenaient des paris.
Spectacle réjouissant, coloré ; mais aussi triste par toute cette vie étalée, là sur le trottoir.

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