Le vide-grenier

Des verrines en pagaille. Des savonnettes aux formes incongrues. Une statue représentant un obscur colonel. Une boite à musique délivrant cette ritournelle un peu usée. Tout autour d’elle des objets plus insolites les uns que les autres. Le vide-grenier. Ce mot était tellement bien trouvé. Chaque objet de ces étals appartenait bien au grenier de quelqu’un. Parfois, elle se disait que cela pourrait aussi bien s’appeler un rempli-grenier. C’est vrai finalement, le vide de certains devenait le plein d’autres. Elle déambulait dans les allées. Rien ne retenait son attention et tout en même temps. Comme si elle voulait graver l’image de chaque objet dans sa mémoire. C’était un peu le cas au final. Elle essayait de capturer l’essence de ce rassemblement. Un moment un peu hors du temps où chacun ressort les objets de son enfance, de l’enfance des autres, de la vie des autres. Elle voyait les vendeurs et acheteurs parler du prix, manipuler les objets pour en trouver les défauts. Et pourtant, le tout restait joyeux, bon enfant. Finalement, c’est cela l’esprit d’un vide-grenier, se dit-elle. Cette envie de se débarrasser de ce qui nous encombre tout en espérant ramasser quelques pièces. Cette envie de trouver la bonne affaire au détour d’un étal. Trouver quelque chose que l’on cherche depuis longtemps ou quelque chose dont on n’a pas besoin. Et pendant ce temps-là, le reste du monde continue de tourner sans que les gens s’en rendent compte. Et puis, c’est l’occasion de voir de têtes connues. Des personnes que l’on voit moins souvent. Comme cette petite friponne de voisine, qu’elle vit au loin. Avec ses tresse au vent et un nouveau jouet à la main. Elle sourit alors à cette image qui représentait tellement cette petite fille malicieuse et drôle qui vivait dans le maison d’à-côté. Elle salua ses parents en les croisant et accorda un grand sourire à la gamine qui le lui rendit en lui montrant sa nouvelle peluche. Un petit chien bleu un peu plat et dont la peluche avait disparu à certains endroits. Pourtant, il souriait encore avec ses petites billes à la place des yeux et son tissu fleuri sur le ventre pour raccommoder un trou. Cette petite peluche avait fait le passé heureux d’un enfant et ferait le futur heureux de cette petite fille. En continuant vers son stand, enfin celui de sa mère qu’elle aidait, elle se dit que cela faisait aussi parti de l’esprit du vide-grenier. Donner une seconde vie aux objets. Leur permettre de rendre heureux d’autres personnes comme ils nous ont rendu heureux. Cette petite fille méritait d’être la seconde vie de Nestor.

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