le Retour des Cloches

Ce dimanche était celui de Pâques. Chez mes grands-parents c’était un grand jour, & pour nous les enfants, cela tenait de la magie féerique, merveilleuse.

Nous savions qu’avant le grand déjeuner, qu’exceptionnellement nous prendrions à la salle à manger avec les parents, allait avoir lieu « le retour des cloches ».

Nous étions excités à l’idée qu’avec un peu d’astuce & beaucoup de chance, nous allions remplir plus que les autres nos récipients de plein de chocolats multicolores, trouvés tant bien que mal, avec force hurlements & précipitation dans différents coins du jardin & du parc. Ensuite, nous partagerions entre nous, afin que les plus petits ne soient pas trop lésés. En fait, chacun s’arrangeait pour en mettre de coté au préalable dans une cachette repérée soigneusement.

Le déjeuner qui suivait était très ordonnancé par les différents plats, que nous voyons souvent pour la première fois. Le clou que nous attendions était la grande pièce montée, décorative seulement, un paon, un héron ou une simple oie, entiers dans leurs atours de plumes & de rubans. C’était magnifique.

Après le déjeuner, l’habitude commandait que les femmes & les hommes se séparassent. Ces derniers passaient dans la salle de billard attenante au grand salon. Grand-père y tenait le premier rôle avec simplicité & bonhomie : il ouvrait un grand coffret à cigares en marqueterie & loupe de merisier, clouté d’argent ; & mon père, mes oncles & les plus grands de mes cousins choisissaient avec des mines gourmandes le cigare qui leur paraissait le meilleur. Ils le faisaient rouler doucement entre le pouce & l’index, le humaient avec lenteur, un peu, comme je l’avais vu faire par certains hommes auprès de jeunes femmes très belles, dont les rires perlés ravissaient mes oreilles.

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