Le Rital

C’était il y a pile vingt ans. Ce n’était ni dans mon pays ni dans le sien. C’était dans un pays froid qui nous avait accueilli avec de la neige. De la neige jusqu’aux genoux. On était venus étudier encore plus loin de chez nous, loin de nos parents, loin de nos familles et loin de nos amis.
Il était grand, il avait les cheveux noirs. J’étais petite, j’avais les cheveux blonds. Il avait des yeux noirs, moi des yeux bleus. On s’est rencontrés en cours. La moitié de la classe venait d’ailleurs, l’autre moitié était autochtone.
Les gens d’ailleurs se souriaient et, en se disant bonjour, se demandaient d’où ils venaient. On ne savait jamais si on allait tomber sur un compatriote.
Il venait d’Italie, de Toscane peut-être, je ne me souviens plus très bien. En tout cas, du Nord de l’Italie, c’est sûr. Il parlait en roulant les r en français comme en anglais. Il jouait beaucoup de son charme latin. Il exagérait son accent. Il avait des yeux pétillants. La chaleur de l’Italie lui manquait en cet hiver froid et sec du Nord de l’Amérique. Alors, il s’est réchauffé le cœur et le corps avec une Brésilienne.
Il aimait plaire. Il aimait que les filles le regardent. Elles étaient toutes au premier rang quand il faisait une présentation.
On l’appelait le Rital. Il s’appelait Riccardo, en roulant les r, bien sûr ! Avec l’accent sur le i, pas sur le o. « C’est Riccardo, pas Riccardo ! »

Ce contenu a été publié dans Atelier Papillon. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.