Une émulsion et une!

Elle regardait avec lassitude l’émulsion douteuse qui flottait au fond de la tasse de thé. Elle n’a jamais aimé le thé, elle n’a jamais été une héroïne. Rebelle non plus. Elle était ordinaire dans son petit tailleur noir acheté un jour d’automne inespéré. Elle avait regardé le fond de la tasse et il lui avait semblé apercevoir son visage en pleine mutation. Dans le thé à la menthe pathétique que son mari avait acheté elle entendait murmurer ses regrets. Ils mûrissaient et cela lui plût. Enfin elle avait trouvé sa voix. Elle l’entendait même. Une voix nouvelle qui passait à travers son visage qui traversait des paysages entiers. Nouveau pour elle! Elle écoutait sa voix. Elle mûrissait. Comme un beau fruit voué à la contemplation. Sa voix personne ne pouvait la lui retirer. Même pas son mari qui allait arriver d’une minute à l’autre. Il ne la regarderait pas. Elle était transparente pour elle. Il n’entendait plus sa voix. Depuis tant d’années qu’ils vivaient ensemble. Sans se voir. Sans se parler. Depuis tant d’années qu’ils avaient oublié de s’aimer.

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