A l’horizon

Debout dans la cuisine, elle boit son café. Elle a bu une gorgée un peu trop chaude. Elle tient sa tasse dans les mains et regarde l’horizon par la fenêtre. La brume se lève doucement, trop doucement. Chaque matin, elle observe et guette les vagues et espère le retour des morts. Son père, parti avant qu’elle ne se marie. Son mari, parti avant qu’il ne soit père. Chaque matin, pleine de vague à l’âme, elle défie d’un œil sévère cette mer qui lui a tout donné et tout repris.
Son café refroidit dans ses mains. Elle a oublié d’en boire, perdue dans ses souvenirs des rires partagés. Puis, tout s’est arrêté. Presque tout. Elle entend* gémir derrière elle, elle perçoit des gazouillis dedans. Elle pose sa tasse froide dans l’évier, prend une grande inspiration pour cacher sa tristesse.
Elle entre dans la chambre, le soleil brille déjà. Elle prend son fils dans les bras. Elle lui raconte l’histoire de son père, celle de son grand-père happés par la mer. Il la regarde un peu dubitatif puis il lui sourit. Elle lui prépare du lait chaud et quelques tartines qu’il n’arrive pas encore vraiment à croquer.
Aujourd’hui, ils vont tous les deux à la mer. Elle veut le baptiser à l’eau salée, à sa façon. Un sacrement cher à ses yeux, un accord entre elle et l’océan pour qu’il ne lui prenne pas son enfant.
L’eau est fraîche mais ils rient de bon cœur. Elle guette une fois encore l’horizon. Rien devant ce matin-là, sinon l’espoir.

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