La partie de cartes

Mon jeu entre les mains, je me demande quelle carte je vais abattre en premier. Aujourd’hui, nous sommes quatre, pas de renfort, c’est chacun pour soi. Je n’aime pas ouvrir, c’est se dévoiler. Jouer petit et passer la main ? Jouer gros au risque de se rétamer, ça passe ou ça casse, mais ça permet d’engranger des points. Et puis, çà m’évitera de compter. Un tour, deux tours et je suis larguée. Les autres sont au taquet. Choisir une stratégie, j’en suis bien incapable. Pour moi, c’est la loterie à chaque pli. Quelle idée d’avoir accepté cette soirée. C’est à chaque fois le même rituel et je ne me suis jamais améliorée. D’ailleurs est-ce que j’en ai l’envie ? Ma foi, non. Ce soir, j’ai quand même fait un effort, j’ai pris mes lunettes, cela fait la fille qui s’intéresse. Mais j’ai crû voir le crépuscule de ma vie quand je me suis fait souffler mon petit bout. Et pourtant, d’après eux, avec le pli précédent, j’aurais dû le voir, comme sur le panneau de bois devant la fenêtre sur lequel on peut lire : attention, danger mouton. La moutone qui ne sait pas où elle va, en ce moment c’est moi. Mais comme des fantômes, les rois et les reines sont tombées, mes points se sont tassés. Allo Léonie, tu m’entends ? Qu’est ce qu’il me veut celui-là, qu’est-ce qu’il veut me faire comprendre ? Je me replie dans ma carapace comme un scarabée. Je suis coincée, j’ai raté l’essentiel. J’ai pris le parti de l’ignorer, de continuer sur ma lancée, fidèle à moi-même. Au temps des vikings, on m’aurait trépanée.

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