Le nu

Ce soir d’hiver, il fait gris. Paola a été invitée à poser devant les élèves de l’école des Beaux-Arts. Elle n’est pas une farouche exhibitionniste, mais cela arrondit ses fins de mois.

Elle oublie les regards lubriques de certains, se concentre sur sa position de femme nue, offerte à 20 yeux. Pas moins.

Pour lui tenir compagnie aujourd’hui, le professeur a sorti sa mandoline et joue  ses côtés. Paola ignorait qu’il était doué avec cet instrument-là. Car pour le reste, ce n’est pas un expert.

Paola s’interroge sur le rendu final des étudiants. D’habitude, elle ne regarde ni les croquis ni les épures.

Quand il n’y a pas de musique, elle se remémore des poèmes de Rimbaud, Prévert ou Desnos. Une fois les souvenirs passés en revue, elle se rappelle son agenda. Demain, coiffeur, esthéticienne, faire vacciner le chat. Ensuite, ce sera le week-end, et elle le passera chez sa vieille mère. Elle lui racontera qu’elle fait des ménages, pour taire qu’elle dévoile son corps à des apprentis.

Et sa mère lui répètera que si elle avait épousé le fils du voisin, le baron de la Butte, un très beau parti, elle n’en serait pas là, à servir de domestique.

Oui mais voilà, le fils du baron n’était pas beau lorsque Paola était plus jeune, et il n’avait aucune conversation. Ça ne s’est pas amélioré avec l’âge. Un mari fortuné, cela peut être intéressant, mais l’argent seul n’est pas le terreau de l’amour.

Alors Paola était restée seule, mais avait choisi un char pour compagnon. C’est indépendant, un chat ; tout ce qui convient à Paola.

Oui mais un chat, cela ne rapporte rien, répliquait la mère, qui voyait tout en noir.

C'est un peu par hasard que j'ai découvert le plaisir d'imaginer des histoires. D-Ecrire des vies. Et j'ai trouvé avec Cécile et Philippe, et tous les participants, de quoi cultiver l'enchantement. Merci à tous.

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