Ménage salvateur

Dans les vestiges de la veille, elle ramasse un à un les morceaux de sa vie éparpillée. La journée si belle avait basculé dans le tragique. La beauté du ciel avait laissé place à la noirceur des idées. Les mots savamment placés comme des coups de poignards avaient entamés une à une les coutures de son cœur. Cette âme qu’elle avait mis si longtemps à recoudre avait fini d’exploser en même temps que la porte avait claqué. Les yeux  fixés sur la porte et les ongles rentrant dans la peau, elle avait attendu. Et attendu. Au moindre bruit, l’espoir jaillissait mais jamais la porte ne s’était ouverte. Etait-elle restée ainsi toute la nuit ? Avait-elle glissé sur le sol seulement aux premières lueurs du jour ou bien avant ? Réalité et rêve mêlés, elle ne savait plus que penser. Avait-elle suivi cet escalier jusqu’au ciel ou était-elle descendu aux enfers ? A la lumière du jour, les morceaux éparpillés semblent si petits et rabougris. Aucun ne s’emboite avec les autres. C’est comme un puzzle impossible à finir. Un puzzle qui n’a aucun sens. Alors elle les laisse sur la table et ouvre la fenêtre. Le vent s’engouffre et un à un les fait voler au milieu de la pièce. Ils tourbillonnent et s’entrechoquent. Et tout à coup, ils s’emboitent. Pas parfaitement mais la nouvelle couture les maintiendra en place comme avant. Mais en fait non. Parce qu’au sol git la dernière pièce. Celle qui rendait le puzzle impossible. Celle qui n’a rien à faire dans ce bel édifice qu’elle vient de reconstruire. La porte claque à nouveau et le morceau git maintenant sur le perron. Il sera balayé par les vents pour aller rejoindre la personne à qui il appartient. Premier claquement, deuxième claquement. Au-revoir tristesse, bonjour renouveau. Sans le vouloir, il n’avait rien détruit juste tout remis à sa place.

 

Une page tournée. La page du cahier comme la page dans le livre de la vie. Une page blanche. D’un blanc immaculé comme le gel qui recouvre le paysage au dehors. Plus besoin de corriger, de raturer. Il y a l’immensité de la page, comme un nouveau souffle. Une nouvelle écriture.

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