Olé !

Le bruit me réveilla une fois de plus. Assis dans ces draps moites de peur, le souffle hésitant, je cherchai l’ombre sanguinaire dans la noirceur de la chambre.

 

Toujours la même cavalcade, des nuits et des années sans répit.

Les mêmes questions en boucle. Pourquoi ma mère avait épousé un torero Espagnol, pourquoi mon père s’était laissé retourner, encorner, piétiner ?

Le même cauchemar, toutes les nuits… La course du taureau qui bondit et qui tourne dans ma tête comme au cirque. Les cris de la foule ensanglantant la piste. Mon père, pantin disloqué, les entrailles répandues sur le sable, ma mère effondrée et moi, perdu au milieu de ce tumulte.

 

Il me restait un de ses costumes, d’un chic brillant d’écailles, son dernier, toujours imbibé de sang, une énorme déchirure à l’aine. Maman s’est accrochée toute sa vie à ce souvenir sanguinolent. 

Ma mère, c’est ma reine, c’est elle qui m’a rassuré quand petit déjà les sabots des taureaux piétinaient mes rêves. C’est elle qui a éloigné de moi les fantômes de cette journée.

 

 

Son absence est omniprésente quant au matin j’agonise, le souffle chaud de la bête penchée au-dessus de mon lit.

 

La lumière du jour aveugle ma chambre, les taureaux disparaissent, la foule s’éteint, le sable s’est lavé de son sang.

Je me lève et, comme chaque matin, je vérifie si l’arène de la vie est sans danger pour moi.

 

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