Tout là-haut dans la montagne

Dans chaque enfant il y a quelqu’un en devenir. Alors quand je la regarde, je m’efforce de ne pas te voir toi, mais c’est difficile. Plus elle grandit, plus elle te ressemble. Elle a tes gestes. C’est déroutant, elle qui ne t’as jamais connu. Il y a ce portrait posé dans la bibliothèque contre les livres de poésie, mais je ne sais pas si elle le regarde parfois. Elle sait qu’il y a des films aussi, mais elle n’a jamais demandé à les voir. Quand je les visionne, j’espère qu’elle va me rejoindre et qu’on t’évoquera. Je voudrais tellement qu’elle te connaisse, mais sa vie n’est pas là.
Je me souviens qu’au début de la maternelle, elle m’a demandé si elle avait un papa. Sans doute la question avait émergé de sa rencontre avec les autres enfants. Je lui ai dit que tu étais mort. Que oui elle avait un papa, mais qu’il était mort. Elle m’a demandé où tu étais. Je ne savais pas quoi répondre. Alors je l’ai prise sur mes genoux et je lui ai raconté que la montagne t’avait gardé avec elle, tout là-haut, si haut que personne ne pouvait t’y rejoindre. Même les oiseaux ? A t’elle demandé. J’ai souri. Si, j’ai dit, tu as raison, avec lui il y a les oiseaux, de très beaux oiseaux des très hautes montagnes qui l’entourent et le veillent. Elle est restée là un moment et puis elle est descendue de mes genoux vivement et elle est partie jouer dans sa chambre. Je me suis souvenu de nos premières rencontres. Il pleuvait systématiquement et ça nous faisait rire. Pourquoi faut-il toujours que le temps soit si moche quand je suis en ta compagnie ? demandais-tu.

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