Elle s’est enfin décidée. Elle franchit la petite porte en se courbant un peu pour ne pas se cogner la tête. Elle fait glisser le rideau sur ses doigts. Le voilage tinte légèrement pour laisser place à une petite pièce surchargée de pierres, de livres. Le plafond est constellé de petites lunes, de soleils. Une table ronde trône en plein milieu. Une voix lui dit d’approcher et de s’installer confortablement. Elle entend : « Une passion dévorante vous attend » avant même de percevoir le visage de son interlocutrice.
– Mais bien sûr, rétorque-t-elle d’un ton moqueur.
Le tissu d’une robe lui frôle l’épaule. La voix a enfin un visage.
– Bonjour, ma belle.
– Bonjour.
– Sceptique à ce que je vois ?
Elle ne répond pas et fixe la diseuse de bonne aventure droit dans les yeux.
– Un thé ? Un café ? propose-t-elle.
– Un thé, oui, s’il vous plaît.
– Très bon choix.
La gitane se lève, disparaît dans l’arrière-salle, revient avec deux tasses fumantes.
– Ça sert à réchauffer les cœurs, ma belle, et vous en avez bien besoin.
– Merci, répond-elle timidement.
– Bon, avant de commencer, je vais vous demander de fermer les yeux et de me donner vos mains. Respirons profondément.
Pendant quelques secondes, seuls leurs souffles chauds volent dans la pièce.
– Vous avez une belle âme, ma belle. Et beaucoup d’énergies positives à partager.
Elle lui lâche les mains doucement.
Elle bat les cartes sans la quitter du regard.
– Coupez, de la main gauche. Parfait.
Elle retourne le paquet pour voir la coupe. Le 13, un squelette avec une faux. Apercevant son regard affolé, la gitane la rassure :
– Pas d’inquiétude. Ça annonce un grand changement, un changement bénéfique.
D’affolé, son regard devient interrogateur. La gitane étale les cartes et dit :
– Choisissez quatre cartes, ma belle. Très bien. Le Bateleur, toutes les portes s’ouvrent à vous, c’est le début d’une grande histoire.
– Une passion dévorante, pense-t-elle se remémorant le début de la séance.
– Oui, c’est cela. Une passion mais pas dévorante comme je vous l’ai dit en arrivant. Regardons la suite. Le Soleil, ah, beaucoup d’amour, beaucoup, beaucoup d’amour. Ensuite, le Pendu. Va falloir apprendre à lâcher prise ma belle.
La gitane lève les yeux de ses cartes et l’interroge en soulevant un sourcil puis reprend.
– Regardons la dernière. Le 7, le Chariot. Excellent, excellent. Votre prince arrive sur son destrier.
Louise reste perplexe. Les odeurs d’encens et de thé se mélangent et lui font tourner la tête. Elle boit une gorgée trop chaude. Elle souffle sur sa tasse et reprend une gorgée. La gitane s’est arrêtée brutalement et attend.
Le silence s’installe.
Ni l’une ni l’autre ne le brise. Elles se regardent. La gitane esquisse un sourire. Louise demeure le visage figé dans l’incertitude.
Elles boivent leur thé en même temps, reposant leur tasse au même moment. La flamme de la bougie danse et laisse échapper des ombres. Les yeux de la gitane brillent. Elle se frotte les mains pour les réchauffer, pense Louise, pour y convoquer de bonnes ondes, en vérité.
La gitane lui reprend les mains. Louise apprécie ce geste chaleureux. Ses épaules s’affaissent légèrement, sa respiration est plus fluide, plus profonde, ses mâchoires se desserrent.
– Vous ne me croyez pas, n’est-ce pas ? chuchote la gitane pour ne pas brusquer le silence.
– Non, pas vraiment, je suis désolée.
– Ne le soyez pas.
La gitane lui sourit avec les yeux. Louise baisse les siens, laisse ses lèvres dessiner un sourire. Son regard revient sur la gitane qui acquiesce.
– C’est bien, ma belle.
Louise laisse couler une larme.
– Vous me dites n’importe quoi ! s’agace-t-elle presque.
– C’est vraiment ce que vous croyez ?
– Écoutez, ça fait des lustres qu’on me promet une belle rencontre, une belle histoire, du changement, du bien-être, du je ne sais pas quoi encore.
– Et ?
– Et ? Ben rien. Toujours rien.
– Vous prenez garde aux apparences. Vous avez fermé beaucoup trop de portes et vous pensez avoir perdu les clefs.
– Sûrement, mais c’est pour tout le monde pareil. Vous ne m’apprenez rien.
– Je ne suis pas là pour vous apprendre quelque chose.
– Ah oui ?
– Désolée de vous décevoir sur ce point mais non. Je suis là pour vous dire ce que vous savez déjà et que vous ne vous permettez plus d’entendre.
– Soit.
– Fermez les yeux. Respirez profondément et écoutez votre cœur, écoutez votre corps.
Louise ferme les yeux. La gitane resserre ses mains. Les larmes de Louise glissent sur ses joues.
Le silence les enveloppe.
Louise dégage une main pour essuyer son visage. Elle ouvre les yeux et dit :
– Vous savez. J’en ai marre qu’on me promette des rêves inaccessibles.
– Vous n’étiez pas prête, ma belle, à laisser entrer quelqu’un par la petite porte.
– Je ne sais plus où elle est ma petite porte.
– Vous l’avez franchie en entrant ici, ma jolie.
– J’ai essayé, vous savez. J’ai voulu entrouvrir ma petite porte. Je l’avais observé à travers le judas et je m’étais dit « pourquoi pas ? ». Mais il n’est pas venu. Il n’est pas là.
– Mais il viendra.
– Quand ?
– Après.
– Mais moi, je ne veux pas l’attendre, je veux vivre maintenant.
– Alors faites.
– Oui, je fais mais on me promet toujours quelque chose qui va venir et du coup, je suis dans l’expectative. J’en ai assez d’attendre l’après. En plus, ça réveille mes questions, mes doutes. Pourquoi je n’y arrive pas ? Pourquoi il ne vient pas ? Trop de pourquoi ! Je ne veux plus de questions sans réponse. Je crois que c’est pour cela que je me suis décidée à pousser votre petite porte aujourd’hui.
– Regardez, ma belle, invita la gitane en découvrant sa boule de cristal. Regardez bien. Vous le voyez ? Il est là, il vous cherche, il vous attend aussi.
– Mais, c’est qui ? Je ne vois pas son visage.
– Vous connaissez son visage. C’est celui que vous voyez lorsque vous fermez les yeux.
– Je ne vois jamais le même visage. Je vois des hommes, des femmes, des enfants. Ma famille, des amis, des inconnus. Beaucoup trop de monde. Comment être sûre de ne pas me tromper de visage ? Comment savoir si je donne la main à la bonne personne ? Vous voyez après les pourquoi, il y a les comment qui me prennent d’assaut !
– Fermez les yeux et respirez profondément. Quand vous ne savez plus, vous pouvez toujours compter sur votre souffle de vie.
Louise ferme les yeux. Les battements de son cœur qui s’étaient emballés reprennent un rythme de croisière. La gitane lui caresse la paume des mains. Louise sent les chatouilles et ouvre les yeux.
– Vous avez de belles lignes, profondes, longues, puissantes. Ne perdez pas espoir.
La gitane finit sa tasse de thé froid.
– Revenez quand vous voulez, lui propose-t-elle. Ma porte sera toujours ouverte pour vous.
– Je vous dois combien ?
– Rien, ma jolie. Vous m’avez beaucoup donné aujourd’hui. Faites quelque chose pour moi si vous pouvez.
– Oui ?
– Jetez une pièce dans le fleuve. Elle partira à travers les flots et accostera là où une personne en aura besoin.
– D’accord.
– Bonne journée ma jolie. Très belle journée.
– Merci, vous aussi. Merci encore.
Louise caresse le voilage puis passe la porte. Les clochettes tintent encore, leur douce musique la salue et la font danser sur le trottoir. Elle s’éloigne d’un pas léger. Elle regarde le ciel gris, lourd de nuages mais sourit en pensant que le ciel reste bleu sous cette couche épaisse. Elle flâne de vitrine en vitrine. Elle sent les roses du fleuriste, elle détourne son estomac gourmand de la boulangerie.
Elle passe devant une librairie, s’y arrête et entre. Elle va y trouver quelque chose, pour elle, rien que pour elle. Un cadeau, un petit cadeau dont elle a bien besoin. Elle s’arrête sur Apollinaire. Il est mort il y a cent ans, juste avant l’armistice, se rappelle-t-elle. Il est mort pensant que c’était toujours la guerre. La paix, c’était après. Après lui.
Elle prend le recueil de poèmes. Ce sera son cadeau à elle-même. Alcools. Elle s’enivrera de ses mots. Elle trouve l’idée bien. Elle passe à la caisse.
– Un paquet cadeau ? entend-elle.
– Oui, je veux bien.
Elle le posera sous le sapin, y ajoutera peut-être même une étiquette avec son nom. Elle repart le cœur léger. Elle a des cadeaux pour tout le monde et même pour elle. Elle en aura au moins un qui lui plaît, c’est certain.
Elle cherche les clefs dans son sac, souffle sur la serrure grippée. Elle entend des pas qui courent, des pas qui courent vite. Elle entend une voix essoufflée :
– Louise, Louise, attend.
Elle se tourne, reconnaît le visage.
– Je n’ai pas pu venir, je n’étais pas là mais je me suis dit, je viendrai après.
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
Dans ce livre, Anne Berest retrace le destin de ses ancêtres à travers une enquête palpitante et instructive. La réception par sa mère d’une carte postale anonyme, sur laquelle figurent quatre prénoms : Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques, déclenche ses recherches. Dans une première partie, elle retrace le destin de la famille Rabinovitch, à travers l’Europe et en France avant la déclaration de la seconde guerre mondiale, dont les grands-parents, tante et oncle de sa mère seront déportés et assassinés à Auschwitz en 1942. Une deuxième partie, raconte la vie aventureuse de Myriam
C’est un chef d’œuvre d’intelligence et d’humanité. Un des aspects qui m’a plu est le fait qu’elle donne l’étymologie de certains mots hébreu, leur signification par rapport aux textes anciens et leurs liens avec la culture juive.
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