La pièce du fond

En entrant dans la pièce, j’aperçois à gauche un bouquet de fleurs fanées retombant tristement autour du vase. Le meuble sur lequel il est lui-même posé est maculé de poussière. La pièce est sombre. Le jour filtre à peine à travers les rideaux occultants. Une odeur de renfermé titille vers le couloir. Les lattes du plancher centenaire craquent sous mes pieds. Des râles rauques me parviennent depuis la pièce du fond.

Mon cœur se serre. Aurais-je le courage d’aller jusqu’au bout ? J’essuie mes paumes moites sur les pans de mon vêtement avant de pousser la porte qui émet un couinement lugubre. Les ombres dansent sur les murs. Est-ce la mort qui s’amuse dans un battement d’ailes ?

Il est là tapis dans la pénombre, masse informe qui ne bondira pas. Ses yeux me fixent d’un air lointain. D’immenses stries les encerclent. Sa mâchoire écumeuse forme un rictus. La vision est terrifiante.

Je hasarde un pas, toujours aux aguets. Il n’y a qu’un geste à faire pour rompre le silence oppressant : prendre la fuite en courant ou approcher bravement de lui.

Une odeur pestilentielle envahit l’espace. Mon petit mouchoir ne suffira pas à en masquer la présence. J’étouffe dans cet air. Bondir et ouvrir la fenêtre peut-être. Je plaque férocement le morceau d’étoffe contre mon nez et ma bouche et tiens fermement de l’autre ma mallette. Je manque de glisser dans une flaque : l’eau de la cruche s’est renversée.

Pas de front brûlant ni d’épaule déboîtée, il n’y a là qu’un gisant dont je ne peux que constater l’heure du décès.

J’ai juré de traquer sans la relâche la maladie, pourquoi n’y a-t-il pas dans ma poche quelque poudre odorante qui pourrait redonner un éclat de vie à ce pauvre bougre ? Je perçois déjà les gros titres des journaux : nouveau médecin incompétent, qu’il retourne se poser sous un autre toit.

Espérons que l’avenir sera meilleur qu’à présent.

Auteur et artiste visuel née en 1990. Vit et travaille en région parisienne. Participe aux ateliers sous les toits depuis janvier 2018 pour le plaisir d'écrire et de partager un moment convivial. Publications dans les revues An Amzer Poésie, Bloganozart, Fantasy Art & studies et dans les ouvrages collectifs A-Marée (2015), Encuentro (2014), Bloganozart Editions, Les Fiches Canasucre volume I (2014) éditions Canasucre Productions. Parution en 2015 de Jacques Cauda, in Cauda venenum aux éditions Jacques Flament, biographie du peintre et écrivain Jacques Cauda, en co-écriture.

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