A quai

A mon avis, le train est arrivé avec du retard. C’est sûr avec les travaux de nuit, ceux du week-end, les balades des cerfs, des sangliers en ce dimanche ensoleillé, Thomas a dû forcément s’arrêter en pleine voie et attendre. De toute façon, il n’a pas envie de travailler demain alors autant rester là en plaine, des champs à perte d’horizon, se reposer, attendre le petit coup de jus qui le fera redémarrer. Mais il n’est pas pressé, il est bien allongé sous le ciel pour regarder les nuages. Au loin la montagne est belle, le ciel est bleu.
A la gare d’Austerlitz, on s’agite. Ça grouille à la gare, ça vogue sur les quais. Marie-Charlotte trépigne. Elle a organisé une énorme soirée. Elle a invité ses copines péniche et ses copains train. Une soirée spécial célibataires. Ses copines se plaignaient de ne jamais rencontrer personne alors qu’elles étaient bien visibles et pas trop mobiles pour être sûres d’être retrouvées. Ses copains s’agaçaient de ne jamais pouvoir être au même endroit, ne jamais pouvoir se poser. Marie-Charlotte avait alors pris les devants.
Le seul lieu qu’ils avaient tous en commun, c’était la gare d’Austerlitz. Ils pourraient danser au son de la bachata, s’inspirer de la maison de la mode, voyager autrement devant l’Institut du monde arabe et présenter, un peu de loin, leur respect à notre Dame de Paris.
Pendant que l’esprit de Marie-Charlotte s’évade et rêvasse aux potentiels matchs de ce soir, elle entend : « Si j’avais su, le cirage n’aurait pas fondu dans le micro-ondes. »Alors là, si même le vocabulaire s’y mettait, on aurait vraiment beaucoup de mal à se comprendre. Elle tente de souffler : c’est du charbon dans la fournaise ou peut-être du goudron dans la bassine géante…
Thomas est en retard, l’électricité ne revient pas. Il aurait bien aimé voir Marie-Charlotte mais bon, si ça continue, il va s’enfermer dans sa chambre et n’ouvrir à personne ! Il a envie de fantaisie et, pour la toute première fois où il se laisse un peu tenter, l’électricité lui fait défaut. C’est étonnant comme situation. Il aurait bien aimé qu’il y ait un retournement.
Finalement, la nuit tombe sur cette scène obscure et sans aucun sens ni pour Thomas, ni pour Marie-Charlotte.

Ce contenu a été publié dans Atelier Papillon. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.