La salle de joujoux

Il a 30 ans mais est un grand enfant. Il ne l’accepte pas. Oui ce gros mot, ce gros nombre 30.
Et puis il ne supporte pas que ses collègues, plus âgés, répètent, à chaque fois, « Mais tu es tout jeune tu as la vie devant toi ».
Tout jeune peut être pas, il sait au fond de lui que l’âge de l’insouciance n’est plus au rendez-vous et oui notre tout jeune trentenaire regrette déjà ses 20 ans.
Son seul lot de consolation est la musculation. Il s’y rend cinq fois par semaine, il y a 3 pelés et 1 tondu dans la salle de gym mais ce n’est pas grave pour lui c’est une salle de jeu avec de gros joujoux.
Des vélos, des poids, des tapis et Barbie et Ken sont également de la partie.
Chaque jour de la semaine est dédié à une activité, cela permet de décompresser après le boulot.
Ah oui, le travail, à vrai dire cela ne se passe pas très bien, notre homme est en froid avec sa responsable et si il pouvait il lui proposerait de perdre ses kilos en trop avec lui à la salle de gym.
Mais oui bien sûr que notre homme est un goujat.
Et c’est comme cela qu’il lui présentera la chose si leurs rapports deviennent meilleurs.
Dans sa routine, des cours d’abdos fessiers, de zumba, de step, de body pump, de bike. Bref tout pour faire un homme. Au quotidien, il ne peut se passer d’aller demander des conseils aux « coach » et oui cela le rassure !
Conseils qu’il ne suit pas enfin pas vraiment, parce que les cours du soir viennent en réalité compenser les écarts du midi. Ces sacrés repas de midi, où notre homme est seul ou en groupe assis en terrasse même quand il y a des nuages qui se massent et obscurcissent le ciel bleu.
Chaque jour de la semaine notre homme mange à la même table, du restaurant « le chemin d’Edgar », une entrée, un plat et un dessert, et se rêve muscler en attendant l’addition et son café.
« Plus que l’après-midi à passer », se dit-il, et je vais pouvoir me rendre dans ma salle de jeu.
Avant de plier bagage et de retourner à sa voiture, il feuillette une dernière fois, le journal, qui parle d’un accident de train à Toulouse.
Le quotidien de notre homme est tellement calculé, millimétré, que lorsqu’il aperçut une mouche sur la vitre du restaurant, il ne put s’empêcher de crier.

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