L’ouragan

L’ouragan

L’ouragan était annoncé, les autorités avaient prévenu les habitants et leur avaient demandé de se barricader et de ne pas sortir de chez eux. Tout le village s’était préparé. Il avait fallu attacher les barques car la mer allait se déchainer. Rentrer les animaux, clouer portes et fenêtres puis s’enfermer. Pendant deux jours le vent et la pluie ont tout dévasté sur leur passage. Le vent faisait un bruit de tonnerre, les toitures s’envolaient. Puis, peu à peu, lentement, les éléments se sont calmés. Craintivement les adultes sont sortis : dehors le chaos. Complètement hébétés, le cerveau vidé de leurs pensées, de leurs souvenirs, ils observent le paysage ravagé. Comment peuvent-ils imaginer la suite de leur vie ? Certains restent assis les yeux dans le vide, d’autres sont déjà à la tâche et déblaient comme ils peuvent ces amas de débris de toitures, de voitures renversées, d’arbres déracinés à la recherche de blessés. C’est la désolation.

Pendant ce temps, les enfants abandonnés à leur sort se sont regroupés au bord de la mer au milieu d’un amoncellement de planches, de plastiques et de ferrailles tordues. Ils sont inquiets. Tard dans la nuit les adultes continuent de déblayer à la lueur des torches. A marée montante, tel un radeau, cet amas de choses cassées s’est détaché de la plage, maintenant il vogue vers le large emportant les enfants. Où le vent va-t-il les emmener ? Du haut du ciel, la lune les regarde et pleure en silence.

Ils sont muets, ont peur, mais ne le montrent pas. Les petits se donnent pour mission de retrouver les pensées et les souvenirs de leurs parents. Le plus jeune est déterminé à retrouver la recette de gâteau de riz de sa grand-mère. Au loin, ils aperçoivent de longues lianes. Ce sont des algues dit le plus grand. Non, disent les petits, ce sont les souvenirs des parents, il faut les récupérer et les ramener au village. Leur frêle embarcation se retrouve surchargée de longues lanières visqueuses. A espace régulier on voit de petites boursouflures. Ce sont des flotteurs dit l’un des grands qui aimerait bien se débarrasser de cette encombrante cargaison. Non disent les petits, chaque petite bosse renferme une pensée, un souvenir et peut-être la recette du gâteau de riz de grand-mère, il faut les garder et les ramener au village.

Par chance, chahutée par les vagues, l’embarcation de fortune a été rejetée sur la plage des kilomètres plus loin …les enfants sont sains et saufs.

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