De l’air

Dimanche 20 septembre 2020. Une chaleur soudaine et étouffante. Malgré toutes les fenêtres ouvertes, pas un brin d’air qui circule.
C’est dimanche, fin de semaine dans certains pays, début de semaine pour d’autres. Qu’est-ce qui est mieux ? Commencer ou finir par le repos ?
Le dimanche révèle les angoisses de certains comme ce jeune voisin qui fume un joint à sa fenêtre. S’échapper dans les volutes d’une odeur d’herbe séchée. Se rappeler le bruit des vagues. Relâcher la pression. Ça sert peut-être à ça un dimanche : profiter du silence, d’un temps de pause. Ouvrir une poignée, en refermer une autre. Terminer une semaine, en commencer une nouvelle.
Finalement, on met beaucoup de pression sur le dimanche. 24 heures et seulement 24 heures pour remarquer le silence d’une tige de jasmin.
La fumée du joint s’échappe et s’engouffre dans mes voies respiratoires. Je sens mes pieds qui décollent, mes yeux qui s’affolent : la cour intérieure se balance.
Je tousse vite et maladroitement pour évacuer cette odeur de mon corps.
J’aimerais allumer une bougie mais il fait vraiment trop chaud pour un dimanche de septembre. Je pense aux huiles essentielles mais elle me donne la nausée. Je devrais peut-être me laisser aller à respirer les nuages de mon jeune voisin.
Je sors sur le balcon. Il cache son joint. Aurait-il peur que je le répète à sa mère ? Comme je reste un peu trop longtemps sur le balcon à la recherche d’air frais, à la recherche d’air opiacé, il se décide à tirer une latte malgré ma présence.
J’entends la musique trop forte à travers son casque. C’est déconcertant le décalage entre la zénitude qu’il dégage et les aboiements de sa musique déchaînée.
Mon jugement m’effraie. Où est passée ma jeunesse ? Où est passée mon insouciance ? Mon envie d’écouter de la musique fort, très fort ? Ça s’est arrêté quand ? Un dimanche ? Un dimanche où j’avais besoin de silence ?
Le souffle léger du vent m’effleure et danse avec les pans de ma jupe. De l’air, enfin de l’air. Pour combien de temps ?

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