Le pays de Douliana

Douliana m’a fait un tel tableau de son pays que je n’ai pas résisté. C’était l’hiver dernier, un peu après Noël. Elle était passée me voir après une grande balade en forêt sous la neige. Elle était frigorifiée, je lui ai proposé un thé. C’est là qu’elle a extirpé de son sac un petit pochon : Regarde ! Et sens cette bonne odeur de chez moi ! Toute la Crète est là, dans ce Mountain Tea. Un thé des montagnes qu’on boit avec une pincée de cannelle. C’est un breuvage magique qui fait toucher du doigt l’immensité du ciel, chuchote des mots doux aux étoiles !
On a bu ce thé et j’ai écouté Douliana raconter les balades sur les sentiers de son île, les plages et la mer azur, les rires de sa cousine quand elle la voit arriver de France, toute pâle avec sa grosse valise au bout de son bras. Elle m’a raconté le jardin de son oncle Vassili, les melons et les pastèques qui courent entre les courgettes et les aubergines, la moussaka de sa mère. Les récits de Douliana sont comme un musée : ils se visitent avec éblouissement, s’arrêtant sur des détails comme la bague qu’elle porte doigt, un bijou qui se transmet de génération en génération et qu’elle offrira bientôt à l’enfant quelle porte dans son ventre.
Ensuite on a joué silencieusement aux échecs. Là-bas aussi on joue, m’a-t-elle glissé à l’oreille. Alors là, ça m’a décidée ! Jouer aux échecs à l’ombre des ruelles étroites, le matin dans le vent rafraîchissant ! J’allais l’été prochain, une fois n’est pas coutume, abandonner mes marées basse bretonnes, mes crêpes au beurre et mes marches dans le crachin, le grand soleil et les nuages noirs ! Je prendrais l’avion, moi qui d’ordinaire aime tant rouler pendant des kilomètres sur cette autoroute qui m’emmène vers mon grand Ouest !

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