Définir un mot, une expression. Définir des choses qu’on ne comprend pas. Définir sa vie. En dessiner les contours. Tracer des chemins. Repousser les frontières. Sortir de ses gonds. Définir, toujours définir pour savoir, toujours savoir, pour comprendre, toujours comprendre.
Dans définir, il y a finir. C’est bizarre, non ? Finir quoi ? Finir une chose pour en commencer une autre. Faut-il vraiment mettre un terme à une histoire pour qu’une autre commence ? Peut-être, peut-être pas. C’est un peu comme les chemins qu’on choisit. À droite, à gauche, droit devant, faire demi-tour. Où allons-nous ?
Elle était enfoncée dans le fauteuil en velours rouge passé. La conférence durait déjà depuis quelques temps. Elle ne savait plus trop quand elle avait commencé et encore moins quand elle allait terminer. Cette conférence ne pourrait peut-être jamais prendre fin.
Sofia aimait apprendre, découvrir, décortiquer les choses pour mieux les appréhender. Elle s’amusait avec les mots, elle s’émerveillait devant un reportage sur une civilisation lointaine ou disparue. Elle en était sûre au fond d’elle. Tout s’explique, tout s’enchevêtre. Dans sa tête, ça se bouscule : une idée par ci, une analyse par là, un souvenir par ci, un rêve d’avenir par là.
Sofia s’était laissée porter par le titre de cette conférence « Où allons-nous ? ». Une question que l’on se pose sans cesse, que l’on soit perdus ou non d’ailleurs. Sofia se demandait pourquoi il était si important de savoir où on allait, où on devait aller. Quel est l’objectif à atteindre au bout du chemin ?
Sofia avait un peu décroché lorsqu’un intervenant avait tenté vainement d’attirer l’attention du public. Il avait une voix soporifique, sans coffre, sans élan. Sofia avait à peine entendu sa première phrase. Elle avait pensé : il aurait dû aller à la conférence de prise de parole en public puis son esprit s’était évadé.
Elle se souvenait d’un caillou tombé, le soleil brillait dessus intensément, comme s’il voulait attirer son attention sur ce petit caillou gris. Elle s’était penchée et l’avait pris. Elle l’avait tourné, retourné, exploré sur toutes ses coutures de caillou gris. Quel que soit l’angle sous lequel elle le fixait, le soleil lui renvoyait un rayon en pleine pupille.
Depuis lors, Sofia gardait ce caillou, qu’elle considérait comme empreint de magie, dans sa poche gauche. Quand elle se sentait perdue, quand les questions fusaient trop dans sa tête, elle le prenait entre son pouce et son index pour se rappeler qu’elle l’avait trouvé sur son chemin.
Le voisin de Sofia la sortit de sa rêverie. Il commençait à ronfler. Sofia sourit, hésita à lui donner un coup de coude pour qu’il arrête de ronfler. Elle tenta de siffler mais sa bouche en cœur n’exhala qu’un petit souffle chaud sans le moindre son.
Son voisin plissa le nez et marmonna « Et si c’était à l’envers ? ». De quoi pouvait-il bien rêver ? Sofia se recala dans son fauteuil délicatement pour ne pas réveiller le bel endormi. Son fauteuil grinça. Son voisin sursauta et mit quelques secondes à se resituer. Il se redressa, essuya la commissure de ses lèvres où sa salive s’était échappée. Il se racla la gorge. Sofia le regarda avec des yeux ronds mais rieurs.
– Je suis désolé, dit-il.
– Il n’y a pas de mal.
– Vraiment, je suis désolé, ce n’est pas très poli, ni pour les intervenants, ni pour les spectateurs.
– Je sais, mais ça arrive. Et puis, lui là-bas, il a une voix de berceuse.
– Ah, ça doit être pour ça alors. En tout cas, ça m’a fait du bien.
– Tant mieux.
– Vous savez pourquoi ça m’a fait du bien ?
– Ben, j’imagine que vous étiez fatigué.
– Oui et non. En fait, j’en ai marre de dormir seul. Et puis, là, à côté de vous, sans être vraiment à côté de vous, je me suis senti bien, enveloppé. C’était doux, douillet.
– Ah, c’est gentil.
– Dites-moi, sans vous paraître indiscret, vous dormez avec des chaussettes ?
– Non, répondit Sofia dans un fou rire, pourquoi ?
– Pour rien. Pour rien. Je m’appelle Phil et vous ?
– Sofia, enchantée Phil.
– Enchanté… Ça parle de quoi sur l’estrade ?
– De choses qui doivent finir pour que d’autres commencent. Enfin, j’en étais là. Là, maintenant, je ne sais pas trop où ils en sont.
– Vous avez décroché aussi ?
– Oui mais je ne me suis pas endormie, le taquina-t-elle.
– Touché ! Mais vous deviez rêver alors, non ?
– Oui, sûrement. Je réfléchissais à ce qui avait été dit et je me disais que je n’étais pas trop d’accord.
– Eclairez-moi.
– En fait, je ne pense pas que les histoires doivent s’arrêter pour qu’une autre commence. Je pense que chaque élément d’une histoire en amène une autre. Parfois, on répète les mêmes histoires, parfois on pense qu’elles sont finies mais elles vivent en nous pour toujours. Et puis, les histoires s’écrivent simultanément, chacun prend une voie ou une autre, s’accroche à une branche, un rocher, un élément de décor. Nos chemins de vie ne sont pas des lignes droites. Enfin, je ne pense pas. On va, on vient, on reste sur place, on revient en arrière, on imagine ce que sera demain. A chaque croisement, ça peut être une histoire ou une autre. Vous imaginez un peu toutes ces possibilités ?
– Euh, oui, mais à un moment, ça serait quand même bien de suivre un chemin, non ?
– Oui et non. Et si notre chemin, c’était de laisser la place au hasard, d’arrêter de pleurer son passé mais plutôt de le prendre comme un chemin qui nous enrichit et qui nous a construit pour être la personne qu’on est aujourd’hui.
– Dis donc, ils auraient dû vous demander à vous de mener la conférence. C’est sûr et certain, je ne me serais pas endormi !
– Arrêtez de vous moquer !
– Non, je ne me moque pas…
Des applaudissements éclatèrent dans la salle. Les intervenants remerciaient et serraient des mains.
– Mince, dit Phil.
– Oui, c’est bête, on n’aura pas eu la conclusion de cette conférence.
– Vous croyez vraiment qu’ils avaient une réponse à « Où allons-nous ? »
– Je ne sais pas. J’aurais bien aimé savoir.
– Pourquoi ?
– Pour savoir où je vais…
– Et vous pensez vraiment que ce sont ces guignols qui vont vous le dire ?
– Ben non, mais peut-être que s’ils savent eux où ils vont, je pourrais me rassurer et me dire qu’un jour je saurai pour moi.
– Foutaises et balivernes !
– Pardon ? Et puis, vous venez des quel siècle pour utiliser ces interjections ?
– Je viens d’aujourd’hui, de la même époque que vous mais j’aime bien, ça me rappelle des temps d’avant…Bref, moi, je sais où vous allez, en tout cas, dans les cinq prochaines minutes.
– Ah bon ? Eclairez-moi !
– Vous allez prendre un café avec moi. Ou un thé. Un thé, non ? Vous avez une tête à offrir du thé au Père Noël.
– Quoi ? éclata-t-elle de rire, offrir du thé au Père Noël ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
– Oh la la , je m’embrouille. Je crois que j’ai rêvé que vous buviez du thé avec le Père Noël dans la cage de votre escalier…Il me faut vraiment un café pour réveiller mes idées.
– D’accord, allons-y.
Phil et Sofia marchaient côte à côte, même s’ils ne se touchaient pas, Sofia avait l’impression douce et étrange qu’il l’enlaçait dans ses bras. Phil rougit. Pas un mot n’avait été échangé de la sortie de la salle à l’entrée du café. Pourtant, une intense discussion avait eu lieu entre leurs âmes.
Le serveur leur apporta un café allongé et un thé dans une petite théière individuelle. Chacun prit sa tasse à mains pleines pour se réchauffer un peu. Ils échangèrent un regard par-dessus la porcelaine blanche. Toujours pas une parole.
La télé du café braillait. Ils entendaient « C’est officiel, vous êtes en couple ? ». Puis une dispute et « T’es célibataire ! ». Sofia n’osait pas trop avouer qu’elle suivait le programme. Pour quelles raisons ? Elle ne le savait pas vraiment. Peut-être pour mieux comprendre la société d’aujourd’hui. Elle savait que tout était scénarisé mais elle s’attardait sur ce nouveau choix de vocabulaire. Ses sourcils s’étaient dressés quand elle avait entendu « On est en pré-couple ! »Ça veut dire quoi ? s’était-elle demandé. En pré-couple, c’est quand on s’est fait un bisou sur la bouche. Puis l’étape d’après, qu’il fallait absolument officialiser, c’était d’être en couple. Comprendre : on s’est fait un bisou avec la langue ! Et surtout, on ne rompt pas, on dit à l’autre qu’il est célibataire pour lui permettre d’être libre comme l’air pour être en pré-couple. Ça faisait rire Sofia.
Phil rompit le silence :
– Il est bon ton thé ?
– Oui, très.
– Tu voudrais aller où après ?
– Me promener dans les bois.
– On est un peu loin là, non ? Ça te dit de faire un tour aux Tuileries ?
– Ça manque un peu de vert là-bas, non ? On le traverse et on va ailleurs ?
– Tu vois que tu sais où tu vas.
– Nuance, je sais où je veux aller et dans la vie, ça ne correspond pas toujours à où je vais.
– … Sofia ?
– Oui.
– Tu étais en train de penser à quelque chose quand on est entrés dans le café ?
– Aux étiquettes.
– Aux étiquettes ? Quelles étiquettes ?
– Tu vois la télé là-bas ? Un jour, ils sont en couple, un jour célibataire.
– Oui, je sais, c’est du grand n’importe quoi.
– Ah parce que tu suis aussi ?
– J’ai honte de le dire mais oui, sourit Phil.
– T’inquiète, moi aussi et franchement, je ne sais pas pourquoi je regarde. Mais contre toute attente, ça me fait réfléchir à des choses de la vie.
– Ah oui, quoi par exemple ?
– Aux étiquettes !
– Eclaire-moi.
– Je me suis dit que les gens se sentent souvent obligés de se définir et s’enferment dans des étiquettes de statut, de sexualité, de façon de manger…Il n’y a plus de place pour être tout simplement.
– Oui, c’est vrai…T’as fini ton thé, on y va ?
Le Jardin des Tuileries était plein de monde, ils descendirent sur les berges où le vent chantait, la Seine battait la mesure. Un oiseau se posa sur un pavé. Phil décrocha. Sofia décrocha. Tous les deux s’asseyaient sur une poutre en bois en même temps. Tous les deux fixaient la Seine, le va-et-vient des péniches. Tous les deux se souvenaient de belles choses.
Phil ferma les yeux. Sofia ferma les yeux. Ils ne se touchaient pas. Ils ne parlaient pas non plus. Ils s’écoutaient respirer. Ils entendaient le cœur de l’autre battre. Ba bam. Ba bam. Les battements de leur cœur s’accordèrent à celui du fleuve.
Phil était dans les bois. Sofia était dans les bois. Ils y rencontraient des personnages de conte qui voulaient changer d’histoire. Leurs mains se frôlèrent. Phil dit dans son rêve : il faut suivre le sentier. Sofia dans son rêve lui répondit : allons-y.
Le sentier était parfois étroit et envahi d’herbes folles, parfois un peu plus large avec des pierres comme des pas japonais. Sofia dit à haute voix : J’aime ce sentier, je pense que je vais prendre la boucle par là. Phil lui répondit à haute voix : Oui, c’est joli par là. Va voir. Moi, je vais passer par là. On se rejoint là-haut ?
Sofia se roula dans l’herbe fraîche. Phil cueillait des pâquerettes et des pissenlits. En haut du sentier, il lui tendit les pissenlits et dit : Souffle et fais un vœu. Sofia dit tout haut : que chacun de nous soit heureux sur son chemin. Que de temps en temps, nos chemins se croisent et n’écrasent jamais le chemin de l’autre. A toi, dit Sofia.
Phil lui retira des brins d’herbe de ses cheveux et dit : que nos âmes ne cessent jamais de se comprendre. Que nos chemins s’éclairent mutuellement même dans les moments sombres. Tiens des pâquerettes.
– Viens, on joue à tu m’aimes, un peu, beaucoup, à la folie, passionnément ?
– Si tu veux, mais toutes les pâquerettes de la terre te donneront une réponse différente. Ça dépendra des jours, ça dépendra des nuits. Mais nos âmes toujours sauront.
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
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