Baraka

« Vas-y file les pépettes, amiga ! Allez quoi, je suis sûr que t’as la baraka, tu peux bien m’en donner un peu quoi ! Allez quoi…

Tu sais que j’en ai déjà vu une de fille comme toi, tu vois. Tout ce qu’elle touchait, ça se transformait en mieux. C’était un peu comme une fée, qu’aurait eu une baguette magique, mais avec un manche en queues de trèfles à quat’ feuilles dis donc.

Alors moi je m’étais mis à la suivre tu vois. Quand elle rentrait dans une boutique, bah pour sûr qu’elle faisait de l’effet. Chez l’aut’ rudesse de boulangère là, qu’avait toujours le sourire à l’envers et l’accueil grinçant comme une vieille porte, tiens bah même à elle, elle tirait un frémissement de coins de lèvres tu vois.

Faut dire qu’elle était belle comme un astre c’te gamine, qu’on aurait dit que toutes les constellations du ciel z’avaient décidé de s’mett’ d’accord pour qu’elle ait quequ’chose tu vois… Elle avait une crinière de lion, les seins d’une vierge, le caractère décidé du taureau… Et puis des paillettes, nom d’un chaton, des paillettes à n’en plus finir, sur ses pulls, dans ses cheveux, dans son parfum, sur ses paupières… et dans ses yeux aussi.

Puis un jour j’lai bien connue tu vois cette fille. A force que j’la suive, elle m’a remarqué et puis on a sympathisé. Moi qui croyais que mon cœur était bien enfermé dans un coffre-fort à double tour qu’on aurait j’té dans un puits bien profond, bah non tu vois, la gamine elle l’a ramené à la surface. J’t’ai dit, tout ce qu’elle touchait ça s’mettait à briller. Même mois tu vois, le vieux schnock que t’as d’vant les yeux, elle l’avait rendu beau, beau à l’intérieur, comme si qu’elle aurait mis d’l’or.

Sauf qu’il y a une constellation, tu vois, qu’avait pas fait son boulot, ou qu’était pas d’accord avec les autres. C’est celle du cancer. Elle en est morte, ma gamine, ma femme. Ouais… Voilà. »

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