Le bord…

Il n’osait pas s’approcher du bord.

Le bord de l’eau ? Non, le bord de l’abime, du sombre océan sans fond qui n’attendait que de l’engloutir s’il se hasardait trop près… Le doux clapotis des vagues, l’écume blanche qui s’abandonnait sur la plage, n’étaient que des leurres déployés par un dieu malin, tapi au fond du gouffre. Le ravissant ballet des mouettes ne l’aveuglait pas sur la véritable nature du tableau enchanteur qui s’offrait à ses yeux. Tout était tromperie, illusion, déception, et il sentait les larmes venir malgré lui, comme convoquées par un invisible oignon…

Il avait quitté les dorures et les lambris de l’hôtel pour se confronter à sa plus grande peur, mais il n’était qu’un fou, trop orgueilleux pour admettre la profondeur de sa hantise viscérale ! Une frayeur quasi mystique, infondée et pourtant chaque jour avérée. Même les mots seuls lui faisaient peur. Canal, grève, bassin, tout était promesse d’angoisse et de vertige intérieur… Affliction, déréliction, son équilibre intime s’effondrait en un instant, dans un tourbillon infernal, une folle ronde de panique.

 

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