Nostalgie

Je pense avec nostalgie, avec envie, avec impatience à l’été, dans notre maison en Normandie…..comment sera le prochain été ? qui pourrait le dire? C’est la maison de l’improvisation, où se mêlent toutes les générations, de 3 à 96 ans. Y viennent les amis, les enfants, les vrais faux enfants, les ex des enfants, les petites cousines, les vieux oncles. Depuis l’enfance j’y ai passé des mois de vacances dans ce joyeux bordel de rires, d’engueulades politiques sévères , de déclarations d’affection.

les plus âgés sont notre précieuse boîte à souvenirs, mémoire brinquebalante qu’on aide à nous raconter leur jeunesse avec des petits mots discrets , glissés pour ne pas les vexer.

les jeunes nous bousculent, nous étonnent, nous étourdissent. Ils n’ont mal nulle part, se lèvent tard, les octogénaires grognent mais eux n’entendent rien, mal réveillés, ahuris, pleins de sommeil et de plaisirs nocturnes. Ils se concoctent d’étranges petits déjeuners qu’ils prennent dans le jardin, quand nous finissons notre repas, à la table voisine. Un fantôme rose et blanc s’enfuit par la fenêtre, dans la cuisine un oignon est  tombé dans le potage, éclaboussant la tarte aux mirabelles. La vie est douce.

Nos petits chéris, nos petites chéries nous demandent ce qu’on pourrait faire, en s’allongeant sur le gazon. On pourrait jardiner, transporter des pierres, creuser des sillons, rempoter des plantes, scier des branches. Là il y a plusieurs écoles. Les grands costauds, les grandes costaudes qui ont besoin de dépenser leur énergie s’emparent d’outils et partent à la conquête de la nature. Les rêveurs regardent avec nonchalance les pelles et les râteaux, pâlissent un peu tout en effectuant des replis stratégiques vers le deuxième étage. Un livre à terminer de toute urgence. Ils y a les fragiles, les inquiets  que la moindre écorchure fait se précipiter vers l’armoire à pharmacie. Est-ce qu’on a bien fait le rappel de tétanos ?

L’oncle Jean somnole en ronflottant à l’ombre d’un pommier. Une demoiselle qui passe lui chatouille le nez avec une herbe dorée.

Dans le lot il y a les vraies citadines, toujours élégantes en chemises blanches fraîchement repassées,  les Marie-Antoinette aux champs, qui découvrent avec ébahissement qu’avant de s’extasier sur ces jolies massifs de fleurs, il faut bouturer, semer, creuser, gratter, sarcler, arroser, oui tous les soirs, arroser! Celles là contemplent le sol d’un air dubitatif. Par contre elles sont prêtes à aller acheter un très beau vase pour réaliser un bouquet japonisant…..et puis il y a les architectes qui, en pensée ont déjà mille fois coupé deux ou trois arbres- on n’imagine pas comme l’arbre est l’ennemi personnel de l’architecte- pour construire une cabane écologique, un cabanon de lecture, un salon de thé, un abri revisité pour le ping-pong etc….

L’unanimité se fait souvent à mes dépends «  dis maman, eh tantine, tu nous ferais ton poulet vallée d’Auge ? »- on n’imagine pas comme la recette locale est l’ennemie de la mère  en vacances- Mais comment leur résister à ces chatons enjôleurs ? La soirée sera un peu gastronomique si je ne rate rien.

on peut  rêver, et s’imaginer que là -bas dans la prairie voisine, des lapins facétieux ont allumé un grand feu ou que des escargots intrépides montent à l’assaut du mur en ruine au fond du jardin. Parfois la vie ressemble à la vie.

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