En passant par les bois

La grêle tombe violemment. De gros glaçons coupants lui griffent le visage. Il a du mal à avancer, le vent est contre lui et ses lunettes glissent sur son nez, emportées par le torrent qui ruisselle de ses cheveux. S’il ne traînait pas ce qu’il traîne, il serait à l’abri depuis longtemps. Un bruit de verre, une explosion près de son oeil. Un grêlon vient de passer au travers de ses double foyers. Ça fait affreusement mal, il se demande s’il n’a pas pris un éclat dans la cornée. Il a l’impression de se noyer dans le vent, sa force lui comprime la poitrine.

Clac ! La bâche s’est prise dans les branches. Il tire dessus, essaye de manoeuvrer, mais c’est lourd, ça lui résiste. Il ne pensait pas que ça serait aussi compliqué. Après un an sans sport, à s’empiffrer devant Netflix, il a perdu de son endurance. Il tire de toutes ses forces.

Clac ! La branche a cédé. Mais la bâche n’en sort pas indemne. Une petite brèche suffit pour que l’eau s’infiltre. Quelques gouttent suffisent pour l’éveiller. Elle sent qu’on la traîne, quelqu’un tire sur ses jambes. Tous ses muscles sont raidis par le froid et les coups qu’on lui a porté. L’eau qui coule sur son front lui fait du bien, même si les racines lui labourent le dos. Elle a les mains libres et elle sent que ça mollit sur le tractage. Il doit fatiguer devant.

Clac ! D’un mouvement rapide elle a sorti un bras. Le trou dans la bâche s’est agrandi. Il n’a rien vu, rien senti. La tempête couvre tous les bruits. Elle sort son autre bras, relève le buste à la force de ses abdos, merci les séances de gainage pendant le confinement. Il peine devant, le dos courbé, ses jambes vont lui échapper. Elle se tient prête.

Clac ! Elle brise une branche et attend. Ses abdos la brûlent. Elle se rallonge doucement, la branche serrée contre elle. Il la pose enfin. Il râle, enlève ses lunettes devenues inutiles.

Clac ! Il n’a pas vu venir la branche qui lui fracasse le front. Elle court en esperant retrouver un sentier, elle fonce sans se retourner.

Clac ! Ses pas frappent le bitume, enfin. Debout dans les feux de la voiture qui approche, elle peut respirer.

Ce contenu a été publié dans Atelier Papillon. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.