Les parents étaient rentrés tout fiers un soir, un énorme sapin ligotté à l’arrière de la voiture. Ils avaient ressorti le carton des décos de Noël et s’étaient mis au travail. La mère essayait de contenir la surenchère des enfants tandis que le père déplorait le manque terrible d’une guirlande électrique.
Dès le lendemain, il écume les boutiques spécialisées à la recherche de la perle rare. Plus il cherche, plus il devient exigeant, fiévreux. Cette guirlande ? Trop cheap, celle-ci ? Trop banale. Il attend le coup de foudre mais il épuise bientôt toutes les boutiques, le coeur flétri.
C’est alors qu’au détour d’une ruelle il aperçoit une petite enseigne qu’il n’avait jamais remarquée. Il entre, sur ses gardes. On se croirait dans un grenier en désordre. Un petit homme apparaît dans un nuage de poussière. Il dévisage le père avec un sourire.
-Ne bougez pas, j’ai ce qu’il vous faut.
-Mais… Le père reste interloqué.
Devant lui, dans les mains du petit homme, brille la guirlande de ses rêves. Elle scintille e mille couleurs, avec des effets clignotants qui feraient pâlir les Champs-Elysées.
-Je la prends.
Avant de partir, le petit homme l’avertit : ne la laissez pas allumée après minuit.
-Pourquoi ça ? demande le père.
Le petit homme ricane.
-Pour éviter la surchauffe bien sûr, vous n’aimeriez pas que votre sapin prenne feu, si?
Le père sent un frisson lui remonter dans le dos. Il se hâte vers sa voiture. Tandis qu’il roule vers sa maison, il pense aux visages radieux de ses enfants quand ils vont découvrir la guirlande. Le rictus du petit homme s’efface de son esprit. Sur le siège arrière, la guirlande ondule à la lueur des lampadaires. Enroulée sur elle-même, les ampoules forment un nid rougeoyant. Au sommet, la prise semble braquer ses yeux sur la nuque du père.
Il chantonne, insousciant.