Dans le jardin calme de la villa de Sisco, seules quelques cigales insomniaques brisent le silence. Assise sur les marches, une silhouette fine fume une cigarette. Dans l’ombre, le point rougeoyant crépite doucement, comme un laser au milieu d’une cible.
Hélène déplie ses jambes et exhale vers le ciel. Ses traits sont creusés et son expression soucieuse. Elle fixe l’obscurité épaisse, repense aux derniers jours. Quelques minutes de pause dans une vie de chaos.
Tout s’est précipité et elle regrette tellement de choses. Mais pour le clan, elle ne peut pas flancher. Ils sont tous à l’affût du doute. Un tressaillement de sourcil peut être fatal.
Le cadavre qu’ils ont repêché n’est pas le bon. Le plan était pourtant idéal. La voiture sabotée, la descente et le virage sec que sa nièce prenait toujours trop vite. Ça aurait été l’accident parfait. Hélène marche les yeux fermés. Elle connaît le jardin par cœur. La nuit n’a jamais été une crainte, au contraire. C’est le seul moment où elle peut arrêter le temps et cette vie qu’elle n’a pas choisie.
Sa nièce a prêté sa voiture à une copine. Aussi bête que ça. Et maintenant elle sait que sa tante a essayé de l’éliminer. La petite proie facile se révèle plus compliquée à attraper. Elle est loin, l’ado qui rêvait de partir à New-York pour visiter les lieux de ses séries préférées. Elle est comme Hélène, le pouvoir, le clan, finalement elle aussi a ça dans le sang.
Ils ne sont plus qu’une poignée à régner sur la Corse. Sous les pas d’Hélène, la terre est gorgée de sang. Si elle pouvait tout arrêter, elle le ferait. Mais c’est impossible. Sa nièce est sûrement déjà prête à la descendre. Tout avoir, ne rien avoir, ça se joue à si peu de choses. Un coup de feu, un coup de chance.
Derrière le figuier, Léa, la nièce d’Hélène, regarde celle qu’elle admirait tant, enfant. Dans sa main, le pistolet est lourd. Au premier éclat de lune, elle fera feu.
