En marche – Overdose Positive

Pieds nus sur l’asphalte,
Bérénice marchait.
Elle avait lu dans Biba que c’était bien pour ressentir toutes les vibrations du sol et reconnecter son corps entier à Dame Nature,
Mais surtout à elle-même.
Positive altitude, plus qu’un état d’esprit,
Sa raison d’Etre.
Tant pis pour le motif léopard qu’imprimait le gravier sous ses talons,
Tant pis pour le gel d’hiver qui s’enfouissait dans les crevasses de ses ongles jaunis par les années.
Bérénice continuait de marcher.
Prise en otage dans sa bulle d’injonction au bonheur,
Figurez-vous bien qu’elle prenait celui-ci au sens propre.
Ainsi, marcher pieds-nus, c’était pour elle garder les pieds sur terre.
Une bouffée de reconnexion pour oublier ses bouffées d’angoisse.
Bérénice marchait encore.
Elle ne pensait à rien.
Ses yeux de biche égarée rivés sur la ligne droite de l’autoroute étaient, de temps à autre, éclairés par les feux rouges et blancs des autos.
Elle croyait ainsi atteindre la lumière au bout du tunnel qu’avait été sa vie.
Pour combattre la tristesse, elle s’était réfugiée dans le dogme de la pensée positive,
Comme un moine dans la bière.
Elle avait bu avidement chaque parôle des Maîtres prêcheurs de l’instant présent.
Mais ceux-là ont-ils jamais eu de tourments?
Alcool, médicaments, rien ne l’avait aidée.
Bérénice, seule au monde,
Par le monde, saoulée,
S’était résolue à marcher.
Marcher,
Marcher toujours.
Jusqu’à son point de non retour.
Tant pis pour ses plaies béantes aux orteils,
Quand elle arrêterait de marcher,
Ou plutôt « si » elle arrêtait de marcher,
Elle les soignerait au mercurochrome.
En boucle, comme un vieux disque, ses pensées tournoyaient,
Elles rebondissaient contre le bitume puis s’envolaient en l’air.
Son âme n’avait jamais appartenu à la famille de celles faites pour le bonheur,
Il en est ainsi de certaines personnes ;
Elles se laissent dériver lentement dans les flots d’un océan de larmes.
Mais, cher lecteur, contrairement à Bérénice,
Quels que soient les tracas placés sur ta route.
Qu’ils soient infimes ou non, et même si ils te coûtent :
Ne passe pas ta vie à marcher,
En scrutant le reflet de ton ombre sur le pavé.
Ne laisse pas le malheur avoir ton ascendant.
Le bonheur est un choix non un instant présent.

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