Moi c’est Peggy

Moi c’est Peggy. J’ai entamé mon errance il y a … tellement de temps. J’aurais aimé m’appeler Hélène. Un prénom de femme romantique au lieu de celui d’une truie ventriloque.

Je suis partie de l’école un peu trop tôt pour chanter. Beaucoup croyaient que j’allais devenir une pute avec ma chevelure, mes seins et mon départ des classes. Cliché. Il est laid ce mot n’est-ce pas, peut-être qu’on devient laid à force de dire des mots laids. Mais non j’ai vraiment chanté ; c’était ma première vie. Des petites scènes par-ci par-là. Ma particularité c’est que je chantais dos à la scène comme si j’allais me jeter dans la fosse en toute confiance aveugle sur les bras gens et qu’ils me porteraient aux nues en criant mon nom. Mais vu que cette vision était plus jolie dans ma tête et que je suis une vraie timide que cela arrange d’être de dos… je ne me suis jamais jetée. Ca cultivait mon mystère, être de dos.

Dans ma seconde vie, j’ai rencontré un maraîcher argentin qui m’a convaincue de monter un élevage de poules vers Cordoba. Des poules aux œufs verts mais pas des œufs d’or. Malheureusement dans ces trois années, les hivers étaient rudes et les poules s’abstenaient de pondre. Je m’abstenais d’être joyeuse. J’avais quitté la scène du jour au lendemain, remplacée par les nouvelles chanteuses qui regardent devant (et sont sûres d’elles). Je suis devenue une pauvre maraîchère qui essaie de vivre de la terre et qui n’y parvient pas. Comme j’aimais davantage les animaux que mon maraîcher, je suis partie un matin d’octobre. Moi je pars toujours du jour au lendemain.

J’ai voyagé seule dans l’anonymat… Jusqu’à rencontrer Alexandre. Un bel homme qui savait ce qu’il voulait et je faisais partie de ce qu’il savait. Alors dans ma troisième vie j’ai décidé de faire fonctionner mes ovaires. Ne faire que cela en fait. Une poule pondeuse dans un grand appartement parisien. Je ne parvenais pas à savoir ce qui était juste de ce qui ne l’était pas. C’était certainement incohérent. C’était ma vie, mes vies, pas finies.

Si je les regardais de haut… Peut-être que je comprendrais de haut.

Ce contenu a été publié dans Atelier au Long cours. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire