Raccommoder les souvenirs ?

Je rentrais d’un long voyage où je m’étais perdue de trop nombreux mois sans parvenir à me retrouver.
Ma décision avait été prise subitement: je rentrais. Nous étions en novembre, les feuilles mortes flanaient dans le vent, les degrés semblaient en chute libre et la neige tentait une incursion précoce obturant le coin du ciel céladon.
La maison se découpait au bout du chemin. Lorsque j’introduisis la lourde clé, la porte gémit et s’ouvrit avec peine. Les souvenirs m’assaillirent avec force et l’espace d’un instant, ma vie défila. J’avançais comme à tâtons à travers des images, des sons et des odeurs qui se rappelaient à moi.
En bas de l’immense escalier, je m’arrêtais net. Un vase en grès en miettes gisait sur une marche. Le dessin mystérieux peint sur celui-ci s’était éparpillé comme un puzzle. Je ramassais chaque morceau et, dans un recoin, récupérai le dernier qui me permettait de le reconstituer.
C’est alors qu’il m’apparut sous un autre jour. Les symboles et inscriptions renvoyaient à ma finitude et comme un lourd secret pesaient de tout leur poids sur ma mémoire.
Une fois de plus, mon choix fut brutal. Avec le déménagement, tout partirait à la brocante sans tri. Le racommodage des souvenirs ne conduisaient qu’à une nostalgie et une douleur profonde que n’atténuait pas la douceur des sensations revécues.
Le raccommodage, c’était un voyage au long cours que je n’avais plus envie d’entreprendre.

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