Sa place

Dis-lui toi que je t’aime, a murmuré Felicia. Parce qu’entre l’amour et la haine s’immisce la peur du réel.
Il a perdu les clefs de son cœur, elle a enfoui la serrure.
Autrefois, elle aurait dit quel petit con ! Désormais, elle se cache derrière ce vieux con. L’enthousiasme avec lequel leur histoire avait débuté s’était retrouvé tellement maigre qu’il s’était évaporé en un clin d’œil. Dans un autre temps, ce clin d’œil avait été une jolie première façon de se regarder.
Felicia murmure à nouveau : Dis-lui toi que je t’aime. Parce qu’on en revient toujours au même.
Dans le brouillard de la réalité, il se cache, il fuit, il s’enfonce dans un monde imaginaire. Il sent la haine grandir au fond de ses yeux, il sent que la bataille est perdue d’avance.
Felicia chantonne : Dis-lui toi que je t’aime. Elle berce son nouveau-né. Elle le berce la nuit, le jour. Elle l’embrasse sur les joues, sur le gras des cuisses quand elle lui change la couche.
Il se montre à peine, il voudrait pourtant être vu, faire partie de leur monde. Il aimerait trouver le chemin, son chemin, leur endroit à tous les trois dans ce lieu où ils ne sont qu’eux deux, sans lui.
Felicia se prépare à sortir. Un petit tour pour prendre l’air avec son bébé. Elle continue : Dis-lui toi que je t’aime.
Les cœurs se brisent en mille morceaux, ils sont piétinés, ils saignent.
Felicia s’accroche à son enfant. Il continue de sombrer comme avant.
Il voudrait oublier, il fait toujours semblant devant un auditoire. Bien sûr, tout va bien dans le meilleur des mondes. Évidemment, je ne me sens pas comme un vieillard inutile et vil.
Felicia revient et continue à chanter : Dis-lui toi que je t’aime.
Il faudra leur dire…

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