Le grand dérangement

En 2023 c’est le lièvre qui remporte la course

Pourquoi sommes-nous si pressés ?

Le citron ne donne plus de jus

Ses pépins sont secs et jaunis

 

Autrefois on fabriquait sa liqueur de Calva :

Piquer une orange de clous de girofle

Et laisser reposer trois mois

Aujourd’hui la mixture est un sirop

Les rhums sont dérangés

 

Nous avons bousculé notre nature ainsi que la Nature

L’herbe n’a plus le temps de pousser ;

L’eau n’a plus le temps de couler ;

La montagne qui dort fait des insomnies

 

Même le héron est désappointé

Son bec n’a pas eu le temps de se développer ;

Dans le vase il ne peut plus boire ;

Et les poissons de la rivière lui échappent

 

En 2023 on met la charrue avant les boeufs

Les roues avancent seules grâce à l’électronique

L’IA remplace les lianes

 

L’été est interminable

La cigale n’a plus de salive pour chanter ;

La fourmi a entassé plus de trésors que la terre peut stocker ;

La canicule provoque la fonte de la sueur sur nos fronts

 

Où est passé le bruit des glaçons qui s’entrechoquent ?

Où est passé le tac de l’horloge du salon ?

Où est parti son rire ?

 

Je regrette l’époque de la chasse à la baleine

Je regrette les attaques nocturnes des coléoptères

Je regrette le sermon du prêtre le dimanche matin

 

Dans le confort du passé au moins nous étions protégés

Aujourd’hui rime déjà avec demain

Alors laisse-moi graver dans ma mémoire

Les fleurs blanches, les chats gris, et les lundis au soleil

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