Je quitte la Terrasse du café où je viens de déguster une délicieuse tartine à la confiture de figue et bu un capuccino dans l’air frais du matin. Je monte en courant les quelques marches qui mènent au musée Ludwig. Une odeur d’herbe humide monte de la pelouse, juste en face de la cathédrale de Cologne. Je ne veux pas prendre le train sans avoir vu l’exposition de Richter. Peu de monde, un ticket vite acheté, mon sac au vestiaire.
Le rouge me saute au visage comme un animal sauvage. D’immenses toiles en strates bien alignées, superposées qui tout d’un coup m’emportent. Des roses palpitent entre des horizontales outremer. Un grand espace m’aspire, me cogne, époustouflée, contre une masse jaune, compacte comme une montagne qui contraste avec quelques aplats indigo. Déjà je ne suis plus dans ce musée, déjà je suis devenue lumière, reflets, scintillements. Des formes se heurtent contre un horizon carmin, couleur de sang, agressif, guerre et ravages. Mais à côté une étendue tranquille m’invite à m’asseoir, à observer les paysages. Est- ce un paysage, est-ce une illusion de paysage ? Plus loin je marche , captivée sur cette plaine grise et blanche, en suivant des chemins de terre ocre. Je suis perdue dans cette rencontre, engloutie dans l’imprévu des nuances, la densité des alignements superposés. Plus loin encore d’affolantes verticales sur fond vert, tout tremble et trouble le regard. On y entre. On en ressort illuminé, décapé, revigoré.
Soudain une porte des enfers, un passage jaune vif derrière deux masses noires. Une porte qui n’en est pas une et vibre contre l’écorce d’un arbre qui n’en est pas vraiment un mais laisse toute la place au plaisir de se laisser emporter, arracher au quotidien, pour finalement quitter le musée en trépignant d’enthousiasme.
Ah Monique, je te comprends et je trouve très juste cette évocation de sa peinture et du choc qu’elle peut produire !
Bravo et merci
Aliette
Monique, Je ne connais pas la peinture de Richter mais tes émotions me donnent envie de le connaître. Et puis, j’aime des phrases à moitié construite, sans détails superflus, qui permettent de plonger en toute liberté dans ces sensations de couleurs. Bravo et Merci. Sylvie