Le règne animal

Je rêve souvent de devenir un animal, oui mais comment choisir dans la merveilleuse diversité de la nature ?

Spontanement je dirais, un bison, oui devenir un bison, ce miracle d’équilibre Entre un mufle épais et des sabots de danseuse, entre des épaules massives et des jambes agiles. Bison, je galoperais sur les grandes plaines du middlewest et aucun animal n’oserait m’attaquer. De la vapeur sortirait de mes naseaux dilatés, je soufflerais, je grognerais en grattant la terre avec impatience. Mais soudain je me souviens que les armées des blancs ont écorché vifs des troupeaux entiers de bisons pour les faire crever lentement sous les yeux épouvantés des indiens. Et s’ils étaient prêts à recommencer ces humains imprévisibles et cruels.

Alors non, plutôt devenir un serpent dans la réconfortante humidité d’une forêt. De la souplesse pour se faufiler, des crochets pour chasser les intrus. Et le soleil, j’adorerais le soleil en longues glissades scintillantes, au bord d’une rivière sur une pierre chauffée à blanc. Je me coulerais sans bruit sous les feuilles d’automne et m’enroulerais au pied d’un vieux chêne. Mais soudain je me souviens que les labos de pointe chassent les serpents pour leur venin. Ah! non, pas envie d’être embrochée sur une longue tige en bambou. Ils seraient capables de me repérer ces humains âpres  au gain.

Quoi alors ? Une vache ? Mais c’est un peu comme un bison ! Non, c’est plus doux, plus paisible et puis j’aurais de grands yeux bruns veloutés aux longs cils de star. Je ruminerais l’herbe fraîche et mine de rien je lorgnerais  le jeune taureau dans le pré des voisins. Les soirs d’hiver je rentrerais à l’étable Dans l’enivrante Senteur de la paille sèche. Je n’aurais ni chaos intérieur, ni étourderie dangereuse, ni mécontentement. Mais soudain je me souviens de l’insémination artificielle, adieu beau taureau, des traites forcées par des tuyaux glacés. L’humain peut être si inventif sans être bouleversé.

Alors quoi, un rat ? Un tigre ? Un crocodile aux reflets mordorés ? Une chouette duveteuse ? Un canard au col chamarré ? Et bien non, à vrai dire, je pourrais devenir un petit virus malin qui pénétrerais sans remord et sans regret dans le ventre d’un humain pour tout y ravager…..

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