Fumée nostalgique

Je lorgnais sur mon écran de téléphone, comme à l’accoutumée, dans l’attente d’un improbable signe de vie. J’ignorais l’instant présent malgré ma détermination à suivre les théories en vogue des gourous de pleine conscience. Puis la voix. Un brouillard sensoriel. Cette mélopée que j’avais goûtée, avalée jusqu’à la lie me percutait à nouveau. « Z’auriez pas une clope ma jolie ? » Je parvins à relever la tête et à accrocher son regard vague et trouble. Je perçus qu’il ne m’avait pas reconnue. Les litres de bière, de vin crasse, la résine de cannabis, m’avaient effacée de son destin. Accueillante, je lui tendis mon paquet de cigarettes et je distinguai à nouveau la finesse de ses doigts, ses ongles immaculés malgré sa décrépitude. Je lui demandai où il vivait, dormait. J’imaginais l’abri d’une bouche d’égout glauque. Il me répondit que son foyer se situait là où ses pas le portaient. Il aimait croquer le fruit du hasard.
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