la quête

Depuis ce matin il cherche. Il ne sait pas quoi ni pourquoi mais il cherche. Des plantes ? des émotions ? des souvenirs ? des rêves ? Son esprit virevolte d’un sujet à un autre sans se poser sur rien.

Rien, c’est ça. Rien. Hier soir, rien ne l’avait inspiré dans cette partition de « la None Sanglante ». Ni l’histoire, ni la mélodie, ni la mise en scène. Il avait massacré son jeu, fait crisser sont archet, soufflé sa rage. Ca restait plat. Qui avait commandé cette œuvre à Gounod : un mécène dépourvu de goût ou un directeur d’opéra en mal de modernité ?

Il aurait aimé s’engager dans « le Dialogue des Carmélites ». Un titre prometteur. Non, son côté anticlérical lui aurait joué des tours là aussi.

Peut-être « Boulevard Solitude » ? Ca correspondait tout à fait à sa vie du moment, entre studio coincé dans un quartier miteux et vide social. Non, déprimant.

« Le pays du sourire » ? « L’ange de feu » ? « La demoiselle des neiges » ? Mignon mais irréalistes. Ca ne faisait pas sérieux.

« L’amour des 3 oranges » ? De la science-fiction.

« Le vol du bourdon « ? C’est comme le Boléro : sans fin. On s’endort en jouant.

« La Dame de pique » ? Pas mal mais le plus beau passage est le chant d’amour de Lisabeta. Rien pour un musicien.

« L’enfant et les sortilèges » ? Non, il avait l’âme désenchantée d’un musicien raté.

« L’âme du philosophe » ? On s’approchait.

Ou peut-être « le palais du silence » ? Oui, son esprit enfermé dans ce corps de musicien cynique, qui ne savait que crier son désespoir et ne savait pas chanter la poésie. Il aurait aimé parler, chanter, faire résonner des mélodies joyeuses, tendres, endiablées, parfois sombres, toujours rythmées.

Ça y est, il l’avait trouvé : « Le monde de la lune ». Un vieil opéra d’un vieux musicien. 1750. Hayden. Un vieux rêve. De la poussière de lune poétique, dorée peut-être, façonnable à merci. Pétrir, sculpter ce paysage insondable. C’était ça.

P.S. : Je n’ai pas eu le temps de jouer « le monde de la lune ». Le directeur de l’Opéra nous a commandé, non ordonné,  « La légende de la ville invisible de Kitège » . Exotique, mais trop de mots, trop de notes. Je cherche encore. Lulu ?

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