Dans les grandes herbes, Alabama s’allonge et s’étire. Elle a un brin long entre les dents et tente de garder les yeux grand-ouverts pour admirer le ciel. Elle perçoit quelqu’un lui demander : Peux-tu parler ?
Alabama a oublié qu’elle était venue accompagnée de son petit frère. Il devait sûrement être allongé tout près. Elle lui répond : Je peux t’écouter.
Ah, mais je veux entendre ta voix, Alabama, pour être certain que tu seras toujours là.
– Je n’ai pas très envie de parler. Je voudrais rester ici toute la vie, dans ces herbes hautes, à regarder le ciel, à poser la paume de ma main sur la terre humide, à laisser la fourmi escalader mon bras ou mon mollet.
Je veux faire tout cela en silence.
– On peut faire tout ça en même temps, Alabama ?
– Si tu veux, Tennessee.
– Alors, on fait quoi en premier ?
– Allonge-toi, étire-toi et laisse venir.
– Ça y est. Et après ?
– Tennessee, en silence, essaie, quelques secondes, tu vas ressentir.
Tennessee regarde le ciel puis tourne la tête vers l’endroit où est supposé être allongée sa sœur. Il ne la voit pas, il la devine. Son cœur bat vite. Il met une main sur son ventre pour tenter de se calmer, de se rassurer. Est-elle toujours là ? Les secondes s’étirent et semblent être des heures. Tennessee résiste à la tentation de parler. Il tend l’oreille pour capter la respiration de sa sœur. Il n’est pas sûr, ça se mélange au chant du vent, des herbes folles.
Tennessee se redresse, il fouille dans son sac, il sort son calepin et un crayon. Il écrit les étapes pour ne pas oublier : s’allonger, s’étirer, dans les herbes hautes de préférence. Regarder le ciel. Coincer un long brin d’herbe ou de paille entre les dents. Poser la paume d’une main sur la terre humide. Laisser la fourmi escalader. Écouter le silence.
Tennessee continue à écrire, à se souvenir, à écrire pour changer le cours de l’histoire. Alabama lui dit : Écrire, ce n’est pas prédire.
– Et si c’était le cas, Alabama, tu serais sûrement toujours là ?
– Je suis là, Tennessee, toujours là pour toi, petit frère.
– Pourtant tu m’as dit : et si on partait. J’étais trop petit, je n’ai pas compris.
– Crois en toi, petit frère, crois en ce que tu vois, ce que tu ne vois pas.
– Je n’y arrive plus, Alabama.
– Regarde le ciel.
– Je ne t’y trouve plus. J’ai peur que tu sois perdue dans cette immensité.
– Pose ta main sur la terre.
– La fleur que je t’ai laissée est fanée.
– Allons voir si la rose est fâchée.
– Alabama, tu me manques.
– Je suis là, petit frère. Pose ta main sur le cœur.
– Ça y est. Et après ?
– Écoute bien. Tu sauras qu’on a tous en nous quelque chose de Tennessee.
– Je ne comprends pas, Alabama. Moi, je voudrais avoir quelque chose de toi.
– Je suis là, petit frère. Dans tous les états et même dans un état proche de l’Ohio.
Tennessee se rallonge et s’étire au sol. Il passe ses mains derrière la nuque pour s’en faire un oreiller. Son bracelet de perles au poignet le gêne un peu. Il est hors de question qu’il l’ôte.
C’était son bracelet à elle.
Il regarde le ciel, pas un mouvement, ni un nuage, ni un oiseau. Rien que du vide et du silence.
– Alabama ?
– Oui ? Je peux écouter.
– J’ai pris un coup de vieux, je crois.
– Tu as juste grandi, petit frère.
– Non, vraiment, j’ai pris un coup de vieux. Dans mon cœur essentiellement.
– Ah bon, raconte-moi Tennessee.
– Je me sens perdu et seul. J’ai passé quelques temps avec Virginia, puis avec Carolina. On était voisins mais tellement aux antipodes.
– Tu as le cœur chaud, Tennessee, ne l’oublie jamais.
– J’ai peut-être un cœur d’artichaut aussi. Tu ne crois pas ?
– Peut-être que tu ne sais pas ce que tu cherches.
– C’est ça, exactement !
– Arrête de chercher petit frère. Trouve et comprends qui tu es au fond de toi.
– Je t’ai parlé de Georgia ?
– En voilà une autre qui va te mettre dans tous tes états, hein, p’tit frère ?
– Oui, c’est certain. Elle est brune avec de longs cils noirs. C’est tout à fait mon style physiquement. Mais ce n’est plus comme avant. Je n’ai pas de papillons dans le ventre, je n’ai pas le cœur qui bat la chamade, je n’ai pas de frissons.
– Tu n’es juste pas amoureux, petit frère.
– C’est ça. Mais est-ce que je le serai un jour ? Amoureux, je veux dire.
– Déjà, il faudrait redéfinir ton style. Pas ton style de femmes. Mais toi, en tant que personne. Parce que le physique, petit frère, ça évolue et ça devient poussière.
Tennessee est surpris par l’orage soudain. Il ramasse son calepin, son crayon, les glisse dans son sac. Il court jusqu’au grand arbre le plus proche, le plus feuillu. Il a laissé son beau parapluie en bas de l’escalier à la maison. Il doit se faire une raison et attendre la fin de la saison.
Il s’assoit sur une racine sortie de terre. Il scrute l’horizon : les herbes hautes dansent dans un sens, dans un autre. Les gouttes de pluie glissent en se tortillant sur chaque brin jusqu’au sol.
A travers les feuillages, Tennessee entend le cri des mouettes. Il y a des pleurs et des complaintes dans leurs battements d’aile. Pourtant, elles devraient aimer la pluie, pense Tennessee.
Il reprend son calepin et note la conversation qu’il vient d’avoir avec sa sœur. Il encadre les mots être moi, simplement moi. Puis il souligne les mots quelque chose de Tennessee.
Il faudrait qu’il songe à rentrer chez lui. Il attend la fin de la pluie. Près de lui, à l’ombre d’un saule pleureur, il aperçoit des fleurs de toutes les couleurs. Des fleurs sauvages. Il en cueille quelques-unes, pas trop pour qu’il en reste un peu ici aussi.
La pluie brutale et rapide cesse enfin. Il se dirige avec son joli bouquet vers la stèle. Il renifle le bouquet et dit : Ça va te plaire grande sœur, ça sent bon, c’est sauvage et plein de couleurs, comme toi, Alabama.
Tennessee essuie ses chaussures trempées sur le paillasson. Il tourne la clef dans la serrure. La porte grince un peu, elle n’aime pas l’humidité. Le parapluie se tient droit comme un i, accoudé sur la rampe de l’escalier. A côté du parapluie, une grande valise à roulettes.
Il était temps de partir. Alabama lui avait murmuré : en voyageant, on se souvient de chez soi.
Tennessee lui avait répondu : dis-moi à qui ça sert. Il n’avait pas entendu la réponse. Y en avait-il une ?
Tennessee jette un regard circulaire à la maison et agrippe la poignée de la valise avec la main qui porte le bracelet. Il est temps de partir, de ne pas revenir, en tout cas, pour un certain temps. Il redemande :
– Alabama, crois-tu que c’est une bonne idée ?
Le silence lui répond en écho.
– Qui ne dit mot consent, Alabama, alors moi aussi, tu vois, je vais partir, mais pas comme toi. Toi, tu es partie sans prévenir. Moi, je te l’ai dit, te le redis, je pars. J’aurais voulu que tu me soutiennes, que tu me lances un « Vas-y petit frère, fonce. C’est la vie qui s’ouvre à toi. » Mais tu vois, j’ai du blues plein le cœur et plein la tête. J’en ai marre d’avoir mal et de me taire.
C’est difficile pour moi, tu le sais, mais c’est possible car tout est possible, grande sœur. Je peux le faire. Je peux te parler. Je peux t’écouter. Je peux vivre. Je peux profiter du soleil en terrasse. Je peux et je veux. Il est temps, Alabama. Ne m’en veux pas.
Je reviendrai peut-être quand j’aurai compris ce que tu m’as dit, tout ce que tu m’as dit. Faut-il vraiment que je voyage pour me souvenir de chez moi, pour me souvenir de toi. Sweet home, Alabama.
J’écrirai une histoire sur toi, elle sera traduite dans plein de langues pour que le monde entier te connaisse. Je pourrai écrire cette histoire quand j’aurai compris qui je suis, même sans toi.
Ne me dis pas : « T’en vas pas, si tu m’aimes, t’en vas pas. » C’est justement parce que je t’aime, comme un fou, comme un roi, comme un soldat, comme une star de cinéma que je suis venu te dire que je m’en vais.
Je quitte ces états pour rejoindre le Vieux Continent. J’irai dans le port d’Amsterdam, je laisserai les gondoles à Venise. Je voyagerai en me laissant guider par notre playlist de chansons. Je t’entendrai les chanter avec moi. J’écouterai les paroles plus attentivement, je croirai souvent que tu me délivres un message dans chaque chanson. Il n’est pas mort le soleil, Alabama. Il vit dans la musique de la vie.
Ma chère sœur, je pars.
La valise de Tennessee s’accroche sur les cailloutis. Le taxi attend au bout de l’allée. Un taxi jaune au milieu des blés.
– A l’aéroport, j’imagine, lance le chauffeur.
– Peut-être, je ne sais pas encore si je prends l’avion, le train, le bateau, le vélo.
– Ben faudrait vous décider, M’sieur. Parce que le compteur tourne là.
– OK, vous pouvez allumer la radio pour voir.
Le chauffeur s’exécute. Tennessee trépigne, attend la fin de la pub pour entendre son signe.
Première chanson : la musique de Rocky. Est-ce que ça veut dire qu’il doit aller à Philadelphie, monter les marches et lever les bras au ciel en signe de victoire ?
– Vous pouvez changer de station s’il vous plaît ?
Ça passe sur Céline Dion : parler à mon père. Bon, lui, il voudrait parler à sa sœur.
– On peut changer, ça ne marche pas.
Ton invitation de Louise Attaque. Aurait-il accepté par erreur ce tour du monde ? Ça s’arrête, c’est Holiday de Madonna. Donc, non, c’est bon, il peut partir mais où ? et comment ? C’est nul ce plan avec la radio, ça ne donne pas de destination.
Le chauffeur s’impatiente.
– Je ne sais pas, je suis perdu, je suis désolé. La musique ne me parle pas aujourd’hui. Je suis confus.
– Comment ça ?
– Ben, je voulais me laisser porter par la musique pour savoir où je pouvais aller et là, c’est la cacophonie dans ma tête !
– Et votre cœur, il vous dit quoi ?
– Il me dit d’aller tout droit.
– Et ben voilà, on n’a qu’à commencer par là !
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
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