Le printemps est là. Il pleut. La terre se gorge d’eau. Le bitume crée des rivières citadines. La pluie fouette les carreaux en diagonale et tente de laisser des esquisses de dessins. Au premier rayon de soleil qui s’aventurera, il faudra faire preuve d’imagination pour les voir et comprendre leur message. Un peu comme les dessins dans le marc de café de la diseuse de bonne aventure.
Les cheveux sont longs, il fallait garder la nuque au chaud ces derniers mois. Les relever de temps en temps pour qu’ils ne deviennent pas électriques en se frottant à la laine. Faut-il couper les cheveux longs au printemps ? Faut-il attendre que la pluie cesse ? Faut-il attendre que les larmes coulent pour passer à une autre saison ?
Dans certains pays, il ne faut pas faire couper ses cheveux n’importe quand. C’est une histoire de lune peut-être. Il y a des jours où il ne faut absolument pas. Mais pourquoi ? Quelle est cette superstition ? Est-elle liée à cette légende urbaine qui dit qu’on coupe son passé lorsqu’on coupe ses cheveux ?
Le printemps est la saison du renouveau. Que faut-il garder de son passé, que faut-il jeter dans le caniveau ? Il y a des gens que l’on connaît depuis enfant, d’autres dont on ne se rappelle plus le nom. Il y a des gens nouveaux qui resteront, il y a des gens d’avant qui disparaîtront.
Dans le ciel blanc laiteux et dense, les rêves ne s’envolent pas vers les étoiles pour se réaliser. Ils se cognent, rebondissent, reviennent, déformés ou sur le point d’être abandonnés. Les rêves reprennent de l’élan dans ce ciel d’orage, visent les pétales mauves qui les laisseront passer, qui les laisseront s’exprimer, se réaliser.
Est-ce que couper des cheveux longs revient aussi à couper l’herbe sous le pied de tous nos rêves d’enfant ?
Le printemps est là. Dans la terre germent des prémices de nouveaux rêves. Ils sont assoiffés. Heureusement qu’il pleut. La pluie est drue. Elle tombe désormais avec plus de douceur. Elle emporte avec elle le moelleux des nuages cotonneux.
Milo a pris une douche bien chaude ce matin. Une longue douche pour que le bout de ses doigts se transforment en raisins secs fripés, comme lorsqu’il prenait son bain petit.
Milo aime l’eau à moitié. Il aime celle de la douche, celle du bain, celle de la piscine. Il aime moins celle qui vient en grondant, en tonnant, accompagnée d’éclairs menaçants. Il n’aime pas non plus celle qui va trop vite, celle qui monte dans les tours et se fracasse sur les rivages, les maisons, les arbres. Celle qui transforme les voitures en bateaux qui coulent.
Milo, ce n’est pas son vrai prénom. Il en change selon la saison, selon son humeur, selon ses rêves. A sept ans, il avait choisi Juste, pas parce qu’il était bon en maths, loin de là. Juste parce que, dans ses jeux d’enfant, à la récréation, dans les bois près de la maison de mémé, il rêvait que la vie soit juste. C’était comme ça. Il avait changé de prénom à force d’entendre « c’est pas juste », de long en large et en travers. Il avait alors eu la sensation étrange que cette expression toute faite l’annihilait.
Aujourd’hui, il s’appelle Milo. Ça durera le temps que ça durera. Peut-être le temps que la pluie cesse. Assis en tailleur devant la fenêtre, il regarde le bout de ses doigts se repulper. L’index gauche se reforme en premier, puis l’index droit, celui qui montre le chemin. Le pouce gauche est le dernier à reprendre sa forme. Milo observe plus attentivement ce pouce qui le rassurait tant quand il était enfant. Ce pouce qui l’aidait à s’endormir, ce pouce qui le réconfortait. Il le compare avec son pouce droit. Il lui paraît plus petit. Est-ce possible que son pouce ait rétréci ?
La pluie glisse sur les carreaux. Milo lève la tête vers l’horizon. Il voit le plan d’eau accueillir toutes ces gouttes. Toutes les jolies ondes qui clapotent le font partir vers une musicalité douce et envoûtante.
Adolescent, il chantait, il jouait de la guitare, du clavier électrique, de la batterie. La musique était son langage. Et son prénom, c’était …
Milo avait cherché longtemps son prénom d’adolescent musicien. Il n’avait pas aimé Rémi, Domi, trop communs. Il voulait un prénom un peu rock’n’roll. Il avait exclu Lassie, parce que c’était déjà pris par un chien. Il avait hésité avec Solal ou Mila, mais les prénoms l’envoyaient vers un mode fantastique, loin de la réalité des cordes de la guitare, des touches du clavier et des baguettes qui tapent et résonnent. Il voulait un prénom qui couvrait toute la gamme. Il avait choisi Sido.
Quand les gens lui disaient, c’est le diminutif de Sidonie ? Mais c’est un prénom de fille ! Milo répondait calmement. Non, mon prénom c’est juste Sido. S. I. D. O. Il laissait les gens dans leur incrédulité et passait son chemin en chantant d’une voix parfois aiguë, parfois rauque. Sido aimait beaucoup comme sa voix muait à cette époque, cette instabilité dans son corps, dans sa voix, dans la longueur de ses cheveux toujours gras même quand il les lavait.
A la batterie, il reproduisait le bruit de la pluie, à la guitare le bruit du vent dans les arbres et au clavier, il jouait ses rêves. Sa musique traversait les murs. Sido envoyait de la joie en faisant danser ses doigts rugueux sur les touches blanches et noires.
Au début d’un été, au début d’une nouvelle saison, Sido était monté sur une scène de festival. Il avait plu la veille, il y avait de la boue partout et des splich, sploch accompagnaient ses morceaux.
Dans les coulisses, une fille aux cheveux longs l’attendait. Elle lui dit : Tu te rappelles de moi ? Sido avait froncé les sourcils. Elle avait retenté : t’es sûr, tu ne te souviens pas de moi ? Sido avait cherché : elle ressemblait à son amoureuse du CP. Celle qui lui avait dit, quand il s’appelait Juste : « Je ne suis pas amoureuse de toi, restons juste amis. » Juste avait pleuré toutes les larmes de son corps quand il était rentré chez lui, en attendant un changement de saison, en attendant un changement de prénom.
Ce jour-là, dans les coulisses de ce festival, Sido avait fait semblant de ne pas la reconnaître. Les cheveux qui correspondaient à ce passé avaient été depuis longtemps coupés. Il avait répondu : non, désolé. Je dois y aller. Elle était restée là dans sa culpabilité.
Milo boit son café lentement. Il ne sait pas pourquoi il revient sur ses vies d’avant. La pluie s’accélère devant ses yeux, un vrai rideau d’eau. Ça lui rappelle ces rideaux de perles brillantes qui séparaient la cuisine du salon et qui jouaient du carillon.
Milo se demande si on fait encore ce genre de rideau, c’était une jolie façon de faire des portes qu’on ne pouvait ni fermer, ni claquer. Ça laissait passer les odeurs de cuisine, ça ouvrait l’appétit.
Quand Milo avait commencé sa vie de grand, sa vie d’adulte, il avait cherché un rideau de perles. Il ne l’avait pas trouvé. Alors sa cuisine était ouverte sur son salon, dans son appartement loin de ses parents, loin de sa maman.
Sa maman qui l’appelait mon bébé, mon cœur, mon chat, mon amour. Parfois, elle le disait sans le possessif, de plus en plus souvent sans le possessif au fur et à mesure qu’il grandissait. Elle le laissait changer de prénom, selon les saisons, selon la longueur de ses cheveux.
Dans sa vie d’adulte, Milo était parti vivre loin, plusieurs fois. Il s’appelait Pierre dans cette vie-là. Un prénom terrien, un prénom ancré. Il n’osait pas se permettre de rêver ou, en tout cas, de le montrer. Pierre, c’était un prénom commun, un prénom qui se fondait dans la masse. Pas de vagues. Bien travailler. Être bien sous tous rapports.
Pierre était allé vivre un peu partout dans le monde. Dans les Highlands d’Écosse, à Séoul. Pierre se rappelait qu’en anglais Séoul se prononçait presque comme soul, l’âme en anglais. Il était resté deux ans dans cette ville, avait appris la langue sans savoir ce qu’il ferait de cette expérience de vie. Il y avait aimé les cerisiers en fleurs. Des cerisiers qu’il avait retrouvés d’une autre couleur en Amérique du Nord. Il avait fait plusieurs aller-retours en Amérique du Nord jusqu’au jour où il en était aussi parti pour aller en Angola. Là, il avait appris à parler portugais, pas celui du Portugal, pas celui du Brésil, pas celui du Cap-Vert, celui de l’Angola. Pierre avait mis du temps à se rendre compte qu’il avait changé d’hémisphère. Pourtant, l’eau tournait dans l’autre sens dans le lavabo.
Un jour de pluie, Pierre avait pris le bus, dans une ville pleine d’échafaudages. Il s’était arrêté boire une bière dans un bar lounge. Il s’était même demandé s’il ne jurait pas avec sa bière, un cocktail lumineux aurait été bien plus approprié.
Pierre se perdait souvent dans ses pensées, dans ses rêveries. Il ne les partageait avec personne, de peur de… De peur de quoi se demandait-il. Il avait beaucoup trop de questions en tête. Il fallait qu’il reprenne pied, qu’il trouve sa place dans ce nouveau lieu où la pluie l’avait surpris.
Son travail lui prenait beaucoup de temps et ne le comblait pas. Il aurait voulu retrouver en lui la possibilité du rêve. Les jours secs, il s’asseyait sur un banc pour écrire. Les premières fois, son stylo restait pincé entre ses doigts fermes, son cahier était ouvert, les pages étaient toutes blanches.
Avant les mots, Pierre avait essayé de dessiner les esquisses de la pluie sur sa baie vitrée. Puis, il avait dessiné cet énorme séquoia roux qui lui faisait un peu d’ombre. Les mots ne lui venaient toujours pas, ils ne sortaient pas. Avaient-ils été enfouis ? Avaient-ils disparu à force de couper ses cheveux à ras ?
Les jours secs n’étaient pas encore assez nombreux pour remplir son cahier. Pierre n’avait pas idée du temps qu’il lui faudrait pour créer de la magie, de la poésie. Son rêve était à portée de main mais il ne le savait pas.
Le changement de saison approchait, le printemps était là. Il pleuvait. Ce matin-là, ses cheveux étaient légèrement plus longs. Il avait mis de l’eau dessus, faute de gel. Puis, d’un coup de tête, il avait changé de prénom. Il était devenu Milo : une personne à mi-chemin de sa vie, qui aimait l’eau à moitié, surtout les jours de pluie. Il était parti de ce pays loin, lointain pour s’installer en face d’une île. Ou était-ce un volcan ?
Aujourd’hui, Milo regarde par la fenêtre. A l’horizon, le volcan crachote un peu de fumée. Il a froid, il tousse en ce changement de saison. Il était engouffré dans la neige et la glace pendant six mois avec très peu de lumière. Le printemps est là désormais. Le volcan se réchauffe enfin, prêt à vomir sa lave bouillante. Milo fixe les volutes grises danser et s’étirer dans le ciel.
La pluie est plus fine. Ça fait longtemps qu’il attend que la pluie cesse. Il retire la serviette enroulée sur ses cheveux mi-longs. Il caresse sa barbe et la recoiffe avec ses doigts. Il secoue sa chevelure. Le volcan se ravise. Les couleurs se mélangent du gris, du charbon, du feu, des geysers blancs éblouissants. Le spectacle est surprenant.
Ça fait six mois que Milo vit dans la nuit. Il était venu ici il y a quelques saisons, il y avait vu aussi les six mois de jour.
La pluie cesse enfin. Il enfile ses baskets et sort sans un bruit. Milo tourne à mi-chemin sur une route qui ne lui rappelle rien. Il lève la tête vers une enseigne : un coiffeur.
Aujourd’hui, Milo change de prénom. C’est comme ça !
Utiliser le Blog
Commentaires récents
- Emmanuelle P dans Lijefors
- Emmanuelle P dans Calligraphie
- Emmanuelle P dans Le bleu des vitraux
- Emmanuelle P dans La béquille 1
- Emmanuelle P dans La béquille 2
PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
Recherche
-
Textes par auteur·e
Textes par atelier
-
Derniers textes mis en ligne
Textes par date
c’est tout un roman ça! Comme toujours ton imagination débordante nous fait voyager auprès de ce SIDO-Milo-changeur de prénom devant l’éternel. Chaque image se déroule: il y a les détails d’une vie quotidienne enrobée de fantastique. C’est une musique colorée à rebondissements! Merci
Merci Sylvie pour ton retour.
Ravie de t’avoir fait voyager avec ce texte.
A très bientôt