« L’espiègle » (le roman d’une fausse naïve)

Judith était assise depuis quelques minutes déjà quand s’ouvrit la porte qui donnait sur le petit salon.

A l’entrée, attendait Lucienne Verdurin. C’était une femme large, ronde, imposante & dont on voyait bien qu’elle faisait des efforts pour paraître importante.

D’un geste contrôlé de la main, elle fit signe, sans faire un pas vers elle, à Judith de pénétrer.

Après une embrassade, que chacune des deux femmes s’efforça de rendre amicale, Judith suivit son hôtesse dans cette pièce dont elle avait tant entendu parler, sans jamais y avoir été conviée.

Voilà donc, pensa Judith, ce lieu où la rumeur mondaine situait le carrefour des rencontres, des unions, des alliances & des ruptures.

Madame Verdurin en était le démiurge pour le meilleur, mais le plus souvent pour le pire. Elle aimait cette réputation qu’elle cultivait avec soin.

Judith n’attendit pas pour s’asseoir qu’on l’y invita, ni de même pour prendre un chocolat dans une coupe de porcelaine sur le guéridon à portée de main.

Judith était résolue à jouer la fausse naïve face à Lucienne. Elle ne montra pas sa joie suspecte qu’elle ressentait à être enfin là. Elle savait toutes les intrigues & bassesses qu’elle avait dû accomplir pour parcourir ce chemin.

Certes, elle venait de loin.

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