Lettre de l’au-delà

Là où je suis, tu ne peux pas savoir. Un ruisseau, un terrier. J’observe le ragondin vaquer à ses occupations. Je reste planté au bord de l’eau, les pieds perpétuellement mouillés. Je me laisse bercer par la lumière, jour, nuit, et entre-deux toutes les teintes de gris, bleu, mauve, orange, feu, rouge, beige, jaune pâle. Des fois, j’ai de la visite, un loir fait le tour de mon pied puis s’en retourne.
Je me souviens que je suis déjà venu là avant, foulant la berge sans précaution avec mes bottes, cassant les branches qui gênaient ma progression, soulevant sans ménagement les pierres pour déloger qui s’y était réfugié, voire même qui y habitait.
Plus loin, j’avais découvert un mur de briques. Je les ai cassées une par une. Un petit tunnel partait de là. J’ai gardé ça pour moi, pour la prochaine fois, et il n’y a pas eu de prochaine fois parce que, figure-toi, ce qui est arrivé : un mur s’est écroulé et je me suis retrouvé dessous.
Dans ce tunnel, un coffre bleu, d’enfant sûrement. J’avais soulevé le couvercle, le cadenas était tout rouillé.
Je te raconte ça parce que là où je suis, plus rien n’a ni queue ni tête et là où j’ai été enseveli, a poussé un framboisier.

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