Actrice

Elle prenait des leçons de diction.
Elle apprenait à faire la moue.
Elle apposait une mouche sur sa joue.
Elle posait parfois nue, parfois la jupe blanche, volante, découvrant ses jambes sur une grille d’aération.
Elle s’apprêtait, la coiffure blonde, les lèvres rouges et brillantes, la peau blanche.
Elle prêtait à sa beauté une naïveté, une indolence, une insolence même.
Elle se mariait selon les convenances, selon son intelligence.
Elle se séparait meurtrie, abandonnée, avec la peur d’être folle, avec la colère d’être seule mais à nouveau frivole.
Pourquoi ne s’était-on intéressé qu’à ses jambes, qu’à sa plastique qui faisait fantasmer une ribambelle de personnalités, des célébrités ou non.
Sa loge était envahie de fleurs, de roses, à chaque fois qu’elle venait se mettre en scène.
Elle aimait à dire qu’elle ne dormait qu’avec quelques gouttes d’une eau de toilette.
Elle aimait provoquer en jouant les petites ingénues.
Ses amies travesties la trouvaient un peu cruche, toujours à se faire attendre. Elle pensait à raison que l’attente la faisait désirer.
En fait, elle ne faisait que se préparer, travailler avec sa répétitrice pour donner la bonne intention, la bonne intensité à la bonne réplique. Elle était princesse, reine et même déesse. Ses rencontres avec les amours de sa vie ont été malencontreuses. Elle aurait voulu l’écrire, elle aurait voulu le crier mais il fallait qu’elle continue à faire la belle. C’était son image, ce qu’on attendait d’elle.
Elle venait tard pour chanter, jouer, exprimer sa singularité. Elle portait des robes si proches de ses formes voluptueuses qu’on les croyait cousues sur elle.
Elle était l’auteure de sa vie, une vie tumultueuse, une vie rêvée, une vie qui fait encore couler beaucoup d’encre car sa mort, dans une nuit chaude et moite, reste encore mystérieuse.

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