L’appel de la nuit

Un pas après l’autre, j’avançais lentement dans l’allée envahie par les ombres de la nuit. Derrière moi, la maison était endormie, seuls les volets de ma chambre étaient entrouverts, ouvre boîte de mon aventure nocturne, si souvent répétée, caché sous mes couvertures. Il m’en avait fallu du courage pour passer à l’action. Passer du lit à la fenêtre, de l’observation des mouvements derrière la vitre à l’observation fenêtre ouverte, avant d’enjamber la barre de protection pour entrer dans l’inconnu. Je n’étais plus dans un roman, j’étais dans la vie, dans le réel d’une nuit de lune rousse. Gabin avait refusé de m’accompagner. J’espérais encore l’apercevoir dans l’ombre de l’arbre qui cachait le portail de sa maison mais cet âne bâté, d’habitant des villes ne s’était pas transformé en habitant des bois. Je respirais à plein poumon autant pour apprécier l’air qui m’entourait que pour me libérer de l’appréhension qui m’enserrait la poitrine. Il ne me restait plus qu’à avancer pour atteindre mon objectif, à savoir rejoindre le ruisseau qui se trouvait derrière le cimetière.

Il me fallait donc traverser la forêt, passer par ces arbres dont les branches se penchaient vers moi tandis que les buissons frissonnaient et que les herbes s’accrochaient à mon pantalon. Mes bras me servaient de balancier sur le chemin irrégulier. J’avançais en équilibre sur la pointe des pieds de crainte que mes pas ne fassent vibrer la terre et les pierres annonçant mon arrivée au peuple de la nuit qui se dissimulait le jour pour échapper aux prédateurs qui se répandaient avec l’arrivée de la lumière. Petit à petit, mes oreilles s’étaient mises à percevoir des bruits, des frottements, des glissements qui, peu à peu, m’encerclaient. Malgré la fraîcheur, je sentais la transpiration qui collait à mon sweatshirt. Je devais prendre une décision. Continuer au risque de croiser l’éclair des yeux d’une bête sauvage, de sentir des griffes essayant de m’attraper tandis que du cimetière s’échapperaient farfadets et feux follets interrompus dans leur danse de la mort pour arriver au ruisseau déserté par la loutre ondulante qui ne trouvait plus de poisson… ou bien rebrousser chemin pour préparer une nouvelle tentative ?

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