Du haut de sa branche de pin
La pie entend la cloche des 12 coups de minuit
Ça y est, la nouvelle année est là.
Prenant une grande inspiration
Elle regarde le paysage autour d’elle :
L’hiver a revêtu son manteau de frissons
La rue piétonne est illuminée de haut en bas
Les trois quarts des arbres ont perdu leurs feuilles
Dans quelques heures il n’y aura plus rien à picorer
Alors la pie croque une dernière groseille
Avant de se mettre en quête de son prochain trésor.
Elle tombe nez-à-nez avec une araignée en pleine besogne
– Alors, ça tisse ?
– La toile que tu vois, cela fait 3 ans que je la tisse
J’espère conquérir tout l’arbre d’ici la fin de l’année
Or chaque hiver quand je crois avoir investi toutes les branches le froid gèle ma toison
Et au printemps de nouveaux bourgeons apparaissent, si bien qu’en juin je dois tout reprendre à zéro
C’est décourageant tout de même !
La pie, étonnée, écarquille ses grands yeux bruns
– Allons, ma chère, vous vous compliquez bien la tâche
Moi, j’accumule des denrées impérissables
Chaque année, j’apprivoise une nouvelle famille du lotissement avec ma belle voix
Les nuits d’été je peux m’introduire par leurs fenêtres sans qu’ils ne soupçonnent rien
Et je dérobe tout ce qui scintille
J’entrepose mon butin dans le tronc de ce chêne
Et mon trésor fructifie au fil des ans.
Stupéfaite de jalousie, l’araignée se jette violemment sur la pie
Dégaine sa salive la plus acide et la plus puissante
Et ligote l’oiseau en un éclair
À quoi bon se laisser rire au nez et à la barbe
Par une pie trop bavarde
Quand quelques bobards bien choisis en janvier
Peuvent rapporter en quelques minutes la richesse d’une année ?
Moralité :
Le succès d’une bonne résolution ne se mesure pas à la régularité
Qu’importe la manière d’atteindre son objectif
Pourvu que l’on maîtrise l’art de l’opportunité