A force de lire

A force de lire dans le métro, des L me poussent dans le dos.
Elle est partout. Avec moi. L ma compagne. Mes co-voiturés me regardent tous. Certains attendris, d’autres jaloux, et quelques-uns irrités.
– Aaaah mais faites attention, vous prenez toute la place ! Allez déployer vos ailes d’amour ailleurs ! Bordel de bordel.
– On ne dit pas « bordel » chère madame, commençai-je à rétorquer.
Mais au lieu de quelques mots apaisants, une kyrielle de phrases et de sons enlabyrinthés sortent de ma bouche, tandis que cela frétille dans mon dos.
Tous ces sons, tous ces mots, toutes ces idées qui bouillonnent en moi assourdissent et médusent cette femme Paris-Brest toute droit sortie du 19ème siècle. Je déborde littéralement. Et littérairement.
L me prend la main. Son regard sévère me remue, tandis que sa peau douce m’imbibe.
Je me dis que ces mots sont à moi, et j’essaierai que, bientôt, ils soient pour elle.
Je ferme théâtralement les yeux, ma respiration se calme, je me rassois, et attends que le métro arrive à destination.

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