Lire et vivre

La jeune femme adorait boire de la verveine poivrée sur la plage, en lisant un bon roman. Elle se préparait un thermos avant de partir, puis elle prenait le chemin qui menait à la plage. Il était bordé de rhododendrons et de roses. Elle savait qu’elle serait surement seule sur le sable dans cet après-midi de mars. L’air se réchauffait, mais les rayons du soleil ne suffisaient pas encore pour chasser le petit vent froid. Elle aimait cette combinaison. Ce léger vent qui rafraichit et cette douce chaleur venant du soleil. Elle s’assit sur une serviette le dos calé contre un rocher. Elle se servit de l’eau chaude et contempla la mer un instant en laissant la chaleur de la tasse et du soleil envahir son corps. Celle plus diffuse du soleil sur son visage qui se répand doucement et finit toujours par lui tirer un sourire. Celle plus énergique qui s’échappe de la tasse et irradie ses mains. Il n’y avait que les bruits du vent et des vagues pour la bercer. Avant de sortir son livre, elle observa l’horizon comme à chaque fois. Le point où la mer et le ciel se rejoignent. Où ils ne font plus qu’un. Dans un jour comme celui-ci, le reflet du ciel sur la surface de l’eau donnait l’impression de voir le monde à l’envers. Comme si le ciel et la terre avaient décidé d’échanger leur place pour une journée. Tout était déplacé et pourtant chacun était à sa place. Avant de laisser à ses pensées le temps de s’envoler au vent pour suivre leur course effrénée, elle ouvrit son roman. La dernière fois, elle s’était arrêtée sur un passage clé et quelque peu angoissant. Elle avait attendu toute la semaine en se demandant si Agate, l’héroïne du livre, allait s’en sortir. Elle tourna délicatement la page et commença. Tout le reste disparut alors. Elle n’était plus sur la plage, ni au mois de mars, ni même elle-même. Elle devenait tour à tour chacun de ses personnages. Agate se battant contre un dragon avec l’aide de Maya. Alexandre courant à travers la forêt pour aller sauver son village.Ce n’était plus la vie paisible d’une jeune femme, mais la vie trépidante d’une guerrière essayant de sauver son monde et ses amis. Parce qu’elle lisait toujours à en faire disparaitre la monde autour d’elle.Le jour commençait doucement à décliner quand elle ferma le livre. Une histoire venait de prendre fin pour qu’une prochaine puisse prendre vie. Elle rythmait sa vie ainsi. Souvent , les gens lui disaient qu’elle cherchait à échapper à sa vie pour lire autant. Elle ne le voyait pas ainsi. Elle avait juste un pied dans la réalité et un pied dans un monde imaginaire. Dans des mondes imaginaires, autant que tout ce qu’elle lisait. Et tout cela alimentait son propre imaginaire. Celui où tout pouvait arriver.

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